L’imposition du trust en France en 2018

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Par Lorenzo F. CROCE, avocat aux Barreaux de Genève et de Singapour, LL.M., TEP

L'imposition du trust dans l'Hexagone.

Introduction

Bien que le concept de trust n’existe pas en droit interne français, l’existence et les effets d’un trust constitué à l’étranger sont en principe reconnus en France. Même s’il est différent, le trust s’approche notamment de la fiducie à la française introduit en 2007.

Pour rappel, le trust, institution anglo-saxonne, se caractérise par une séparation entre la propriété juridique (legal ownership, qui revient au trustee) et celle économique (equitable ownership, qui appartient aux bénéficiaires). A noter que ce dédoublement ne doit pas être confondu avec la propriété en usufruit et celle en nue-propriété.

Jusqu’à la publication de l’article 14 de la loi n° 2011-900 du 29 juillet 2011 de finances rectificative pour 2011, la taxation des trusts était essentiellement régie par les principes dégagés par la jurisprudence, créant une importante source d’insécurité juridique.

Depuis 2011, un régime fiscal spécial est applicable aux trusts. Celui-ci sera présenté ci-après.

Principes généraux sur la taxation du trust en France

Selon l’article 792-0 bis du Code général des impôts (CGI), « on entend par trust l’ensemble des relations juridiques créées dans le droit d’un Etat autre que la France par une personne qui a la qualité de constituant, par acte entre vifs ou à cause de mort, en vue d’y placer des biens ou droits, sous le contrôle d’un administrateur, dans l’intérêt d’un ou de plusieurs bénéficiaires ou pour la réalisation d’un objectif déterminé ».

Cette définition reprend quasiment mots pour mots l’article 2 de la Convention de la Haye du 1er juillet 1985 relative à la loi applicable au trust et à sa reconnaissance, à laquelle la France n’est pas partie, à l’exception du fait que le terme « administrateur » a été remplacé par celui de « trustee ».

Le concept de trust est toutefois large et comprend également d’autres structures comme les fondations ou les Anstalts.

Comme il l’a été relevé ci-dessus, cette définition n’a pas pour vocation d’introduire les trusts en droit interne mais uniquement de définir des règles claires sur leur taxation en France. On relèvera que le Code général des impôts ne fait aucune distinction quant au fait que le constituant (en terme technique le settlor) soit la personne physique à l’origine du trust ou en revanche le trustee lui-même (par le biais d’une « trust declaration »), comme cela est souvent le cas pour des raisons de confidentialité. C’est bel et bien la personne qui y a placé ses biens de manière directe ou indirecte (par exemple en cas de « resettlement ») qui est considérée comme le constituant au sens du droit fiscal français. La théorie de la réalité économique prévaut en toute hypothèse sans qu’une apparence juridique ne puisse être opposée.

On notera que le constituant peut lui-même être le premier bénéficiaire du trust. Par bénéficiaire on entend, celui ou ceux désignés comme étant attributaire(s) des produits du trust versés par le trustee et/ou comme attributaire(s) en capital des biens ou droits du trust, en cours de vie du trust ou lors de son extinction.

La loi appréhende enfin la situation des trusts d’accumulation, à savoir lorsque les revenus du trust ne sont pas distribués durant l’année de leur acquisition mais qu’ils sont thésaurisés jusqu’au décès du constituant par exemple.

L’imposition des revenus du trust

D’après l’article 120 alinéa 9 CGI, les produits distribués aux bénéficiaires par un trust défini à l’article 792-0 bis CGI, quelle que soit la consistance des biens ou des droits placés dans celui-ci, sont taxables en tant que revenus de capitaux mobiliers (sans abattement de 40 %). La nature du trust (discrétionnaire, révocable, etc.) est sans importance.

Lesdits revenus sont ainsi taxés depuis 2018, au choix du contribuable, soit en application du Prélèvement forfaitaire unique (PFU) au taux de 30% sans abattement, soit d’après l’impôt sur le revenu classique au taux progressif sur l’ensemble des revenus du contribuable.

Les revenus qui ne sont pas distribués mais réinvestis dans le trust ne sont pas imposables sauf en cas d’application de l’article 123 bis CGI.

Pour mémoire cet article prévoit l’imposition des avoirs détenus à l’étranger, par une personne physique fiscalement domiciliée en France, mais par l’intermédiaire d’une entité établie hors de France où elle est soumise à un régime fiscal privilégié et dont les actifs sont principalement financiers (il faut que le contribuable détienne directement ou indirectement 10 % au moins des actions, parts, droits financiers ou droits de vote dans une entité juridique-personne morale, organisme, fiducie ou institution comparable-établie). Il s’agit d’un dispositif anti-abus mais qui paraît bien mal aisé en matière de trusts. Sans doute, il pourra trouver application dans l’hypothèse où le settlor est lui-même l’unique bénéficiaire du trust de son vivant. Dans l’hypothèse d’un trust discrétionnaire, l’article 123 bis CGI ne devrait en principe pas s’appliquer (TGI Nanterre 4 mai 2004 n° 03-9350, 2 e ch., Poillot).

La remise du capital (composé des biens initiaux et des droits et produits capitalisés) est taxée comme droits de mutation à titre gratuit (DMGT), régime qui sera exposé ci-dessous.

L’impôt sur les successions et les donations du trust

Sous réserve des conventions fiscales internationales (qui prévoient généralement le lieu d’imposition unique de la succession au dernier domicile du de cujus, sauf pour les biens immobiliers), toutes les transmissions à titre gratuit réalisées via un trust sont soumises aux droits de mutation à titre gratuit (DMTG) (y compris les produits capitalisés). Il n’importe pas qu’elles puissent être ou non qualifiées de donation ou de succession selon les règles fiscales de droit commun.

Il ressort de ce qui précède que d’un côté, le droit français prévoit l’application habituelle des règles sur les droits à payer sur les donations et les successions selon le barème prévu à l’article 777 CGI. De l’autre, il dispose de nouvelles règles spécifiques applicables à la mort du settlor.

Ainsi, les DMTG sont dus même si le trust ne distribue pas l’entier du capital et les revenus capitalisés au décès du settlor. Il est donc sans importance qu’une fois l’impôt acquitté, les biens restent dans le trust ou soit distribués aux bénéficiaires après la mort (sous réserve d’une exception mentionnée ci-dessous).

Le patrimoine transmis est toujours taxé à sa valeur vénale nette à la date de la transmission selon les règles suivantes :

  • Si au moment du décès, la part revenant à chaque bénéficiaire concerné est déterminée, chacun sera alors imposé selon les règles ordinaires, en fonction de son degré de parenté avec le settlor et des montants à verser. La valeur des biens transmis par le trust est ajoutée à celle des autres biens compris dans l’actif successoral.
  • En revanche, si le montant exact revenant aux bénéficiaires est incertain (on parle « de part déterminée revenant globalement aux bénéficiaires sans qu’il soit possible de la répartir entre eux »), l’administration appliquera le taux de la classe de bénéficiaires la plus éloignée (45% pour les descendants en ligne directe).
  • Enfin, dans l’hypothèse où les avoirs ne sont pas attribués et demeurent dans le trust ou en cas de transmission d’une part non individuellement déterminée, à des bénéficiaires qui ne sont pas exclusivement des descendants du constituant, la taxation s’effectuera au taux de 60%. Ainsi, par exemple, pour un trust dont le settlor est décédé en janvier 2010 et dont les bénéficiaires sont pour moitié les petits enfants du constituant « vivants à la date du 1er janvier 2018 », les droits de mutations se répartissent comme suit : 45% pour la moitié des avoirs à la date du décès du settlor et 60% pour le reste.

Dans les deux dernières hypothèses, l’impôt  sera alors versé par le trustee mais les bénéficiaires (peu importe leur résidence) seront solidairement responsables du paiement de celui-ci si le trustee se trouve dans une juridiction non-coopérative (article 238-0 A CGI) ou dans un Etat avec lequel la France n’a aucun accord d’assistance mutuelle au recouvrement.

A noter que le taux d’imposition sera en toutes circonstances de 60% si le trust a été constitué après le 11 mai 2011 par un résident fiscal français ou si le trustee est résident dans un pays non coopératif (à l’heure actuel seuls sept territoires figurent sur la liste française : Brunei, Nauru, Niue, le Panama, les îles Marshall, le Guatemala et le Botswana).

Au niveau de la base d’imposition, il convient de distinguer trois hypothèses :

Si le settlor/constituant est domicilié en France au moment du décès, les DMTG seront dus sur l’ensemble des avoirs du trust (à la valeur vénale nette à la date du décès), peu importe le lieu de situation des biens (en France ou à l’étranger).

Dans l’hypothèse où seul le bénéficiaire est domicilié dans le pays lors de la mort du settlor (et l’a été pendant au moins six ans au cours des dix dernières années), les droits sont également dus sur l’ensemble des biens. Cette situation peut soulever des difficultés lorsque le trustee conserve le pouvoir discrétionnaire d’ajouter ou de supprimer des bénéficiaires (par exemple nommés dans la « letter of wishes »).

Enfin, lorsque ni les bénéficiaires ni le settlor ne sont résidents sur le territoire, seuls les biens ou droits composant le trust, situés en France, sont concernés par l’impôt.

A noter que l’article 752 CGI prévoit que sont présumés, jusqu’à preuve contraire, faire partie de la succession, pour la liquidation et le paiement des droits de mutation par décès, les biens ou droits placés dans un trust dont le settlor a eu la propriété ou a perçu les revenus ou à raison desquels il a effectué une opération quelconque moins d’un an avant son décès.

Aussi, quand bien même la transmission a lieu par l’intermédiaire d’un trust, les abattements et réductions de droits ne peuvent être considérés de manière autonome des autres transmissions à titre gratuit entre les mêmes personnes (donations antérieures par exemple).

On relèvera encore que s’agissant des sorties ultérieures de biens restés dans le trust, chaque bénéficiaire devient lui-même settlor du trust au décès du précédent (on parle de « bénéficiaire réputé constituant »). Cela signifie qu’au décès du bénéficiaire, si tous les biens du trust n’ont pas été distribués dans le passé, les DMTG s’appliquent aux nouveaux bénéficiaires selon les règles détaillées ci-dessus. Il en va de même si pour une raison ou pour l’autre il n’y a pas identité parfaite entre les attributaires des biens sortis du trust et les bénéficiaires identifiés lors de la dernière transmission ou si la répartition des droits ou biens sortis du trust diffère de celle opérée lors de la dernière transmission.

L’impôt sur la fortune (ISF), devenu IFI

Sauf exceptions (notamment s’agissant des trusts irrévocables constitués en faveur d’organismes caritatifs ou à but d’utilité publique), l’article 885 G ter CGI prévoit le rattachement des biens placés dans un trust, y compris les produits capitalisés correspondants, au patrimoine du settlor (ou du bénéficiaire réputé constituant) pour leur valeur vénale nette au 1er janvier de l’année d’imposition.

La loi stipule expressément que les biens mis en trust sont soumis au fameux impôt de solidarité sur la fortune (ISF) ainsi qu’au prélèvement sui generis dû en cas de défaut de déclaration à l’ISF. Des obligations déclaratives sont également prévues. Il ressort de ce qui précède que les avoirs du trust sont soumis aux mêmes conditions que les autres biens du settlor, notamment en ce qui concerne le champ d’application, les règles d’évaluation et les exonérations applicables en matière d’ISF. La forme du trust est sans importance ici (révocable ou irrévocable, discrétionnaire ou non). Cette situation peut paraître choquante dans des situations où le settlor s’est réellement dessaisi de ses biens en faveur de bénéficiaires clairement établis. A noter encore qu’en présence de plusieurs bénéficiaires réputés constituants et en l’absence de répartition expresse de l’actif du trust dans l’acte de trust (« trust deed »), l’actif du trust sera réputé réparti à parts égales entre chacun des bénéficiaires réputés constituants.

Toutefois l’ISF a été aboli au 1er janvier 2018, simplifiant en partie la fiscalité des trusts (attention : l’ISF s’applique sans restriction pour les périodes fiscales antérieures à 2018 !). En effet, cet impôt a été remplacé par l’impôt sur la fortune immobilière (IFI). Tout particulier est dorénavant soumis à l’IFI si la valeur nette de son patrimoine immobilier excède EUR 1,3 million. Celui-ci comprend tous les biens et droits immobiliers détenus directement et indirectement (parts ou actions dans des sociétés immobilières, etc.) au 1er janvier. Le taux applicable se situe entre 0.5% et 1.5%. Certains biens sont partiellement ou totalement exonérés (par exemple les immeubles utilisés pour une activité professionnelle, les bois et forêts, la détention de moins de 10 % du capital de la société propriétaire de l’immeuble, etc.) ou bénéficient d’abattements (30% sur les résidences principales par exemple).

Concrètement cela implique les conséquences suivantes, étant précisé que le nouvel article 970 CGI reprend mots pour mots les termes de l’article 885 G ter CGI :

– les immeubles placés dans un trust dont le settlor ou le bénéficiaire réputé constituant est résident fiscal de France sont soumis à l’IFI, quel que soit leur lieu de situation, en France ou à l’étranger ;

– en revanche, dans l’hypothèse où le settlor ou le bénéficiaire réputé constituant n’est pas résident fiscal de France, seuls les immeubles situés dans ce pays sont soumis à l’impôt.

On relèvera toutefois que les personnes visées ci-dessus, dont le patrimoine net excède le seuil d’assujettissement à l’IFI, qui n’ont pas été domiciliées en France au cours des cinq années civiles précédant celle au cours de laquelle elles deviennent résidentes fiscales de France ne sont imposables qu’à raison des immeubles qui sont situés en France, et cela jusqu’au 31 décembre de la cinquième année qui suit celle au cours de laquelle elles ont établi en France leur domicile fiscal.

Bien entendu, ces règles s’appliquent sous réserve des conventions fiscales conclues par la France.

Le prélèvement sui generis sur les trusts, codifié à l’article 990 J CGI, a pour but de sanctionner le défaut de déclaration au titre de l’ISF par le settlor (y compris si le settlor dispose d’une fortune nette inférieure au seuil de déclenchement de l’impôt). Ce mécanisme reste applicable en matière d’IFI. Les mêmes règles sont retenues (biens immobiliers mondiaux pour les personnes résidentes en France (settlor et bénéficiaires) et immeubles situés en France uniquement pour les non-résidents) à la différence que par rapport à l’IFI, le taux du prélèvement sui generis correspond au tarif le plus élevé de l’IFI, soit 1.5% ! Par ailleurs, à la différence de l’IFI, tant le settlor que les bénéficiaires sont concernés par le prélèvement (pas uniquement les bénéficiaires réputés constituants).

Aussi, l’impôt qui est normalement dû par le settlor ou les bénéficiaires, est cette fois liquidé et acquitté par le trustee. Le trustee, le settlor et les bénéficiaires, à l’exception de ceux ayant satisfait à leurs propres obligations déclaratives, sont solidaires de l’impôt, y compris leurs héritiers. Enfin, les exonérations applicables en matière d’IFI, notamment celles tenant à la nature de certains biens, ne sont pas applicables. Il en va de même s’agissant des conventions de double imposition (CDI).

On relèvera encore que par une décision du 15 décembre 2017 (n°2017-679 QPC), le Conseil Constitutionnel a jugé conforme à la Constitution l’article 885 G ter du CGI, mais a assorti sa décision de la réserve d’interprétation suivante : « le constituant doit avoir la possibilité de démontrer que les biens, droits et produits en trust ne lui confèrent aucune capacité contributive, résultant notamment des avantages directs ou indirects qu’il tire de ces biens, droits ou produits ». Cette preuve ne saurait résulter uniquement du caractère irrévocable du trust et du pouvoir discrétionnaire de gestion du trustee.

Il ressort de ce qui précède que si l’administration fiscale dispose toujours d’une présomption permettant de soumettre le settlor ou le bénéficiaire réputé constituant à l’ISF, respectivement l’IFI (ce point reste toutefois à confirmer), celle-ci doit être considérée comme réfragable. Le contribuable peut démontrer aux autorités que les biens mis en trust ne lui procurent plus aucune capacité contributive.

Cette capacité contributive peut résulter des avantages directs ou indirects que le settlor tire de ces biens, par exemple en cas de distribution (quid d’une véritable distribution discrétionnaire ?) du trustee (avantage direct) ou de garanties fournies par le trustee aux créanciers du settlor (avantage indirect). S’agissant de l’IFI, on pourra penser notamment à l’utilisation du bien immobilier par le settlor.

En tous les cas, il appartient à l’administration de faire une appréciation au cas par cas et elle ne peut se contenter d’un examen des seuls documents (trust deed, etc.). Aussi, il reste à savoir si la capacité contributive du settlor sera appréciée chaque année ou une seule fois pour toute.

Obligations déclaratives du trustee

Sauf exception, d’après l’article 1649 AB CGI, des obligations déclaratives sont imposées au trustee lorsque l’une des quatre conditions alternatives suivantes est réunie :

– le settlor ou le bénéficiaire réputé constituant réside fiscalement en France au sens de l’article 4 B du CGI ;

– l’un au moins des bénéficiaires réside fiscalement en France au sens du même article 4 B du CGI ;

– l’un au moins des biens placés dans le trust est situé en France au sens de l’article 750 ter CGI ;

– le trustee a son domicile fiscal en France.

Les déclarations sont au nombre de deux :

Lorsque l’une des trois premières conditions mentionnées ci-dessus est remplie, le trustee, qu’il ait ou non son domicile fiscal en France au 1er janvier de l’année de la déclaration, doit déposer une déclaration événementielle comme suit :

  1. pour les trusts existants à la date du 31 juillet 2011 ou dont la constitution est intervenue à compter de cette date, une déclaration d’existence ; Ladite déclaration doit préciser notamment le contenu de l’acte de trust et le cas échéant, les éventuelles stipulations complémentaires régissant le fonctionnement du trust.
  2. pour les trusts existants au 31 juillet 2011, le lieu de résidence fiscale du settlor ou du bénéficiaire réputé constituant et des bénéficiaires, apprécié à cette date.
  3. pour l’ensemble des trusts, une déclaration des modifications ou extinctions intervenant à compter du 31 juillet 2011, précisant notamment les termes du trust.

Si aucune des trois conditions mentionnées ci-dessus est remplie, le trustee résident en France doit déposer une déclaration événementielle au titre des constitutions, modifications ou extinctions de trusts intervenues à compter du 8 décembre 2013. Cette déclaration doit préciser le contenu des termes du trust.

Le formulaire 2181-TRUST1 doit être rempli dans le mois qui suit la survenance de la constitution, de la modification ou de l’extinction du trust.

A noter que par modification du trust, on entend tout changement dans ses termes, mode de fonctionnement, constituant, bénéficiaire réputé constituant, bénéficiaire, trustee, tout décès de l’un d’entre eux, toute nouvelle mise en trust ou toute sortie du trust de biens ou droits, toute transmission ou attribution de biens, droits ou produits du trust et, plus généralement, toute modification de droit ou de fait susceptible d’affecter l’économie ou le fonctionnement du trust concerné.

Depuis le 1er janvier 2018, la déclaration annuelle ne concerne que les biens immobiliers (IFI) qui rentre dans le champ d’application du prélèvement suis generis sur les trusts.

Elle doit être effectuée aux conditions suivantes :

  • si l’un au moins des settlors ou des bénéficiaires réputés constituants ou l’un au moins des bénéficiaires a son domicile fiscal en France, la déclaration doit comporter l’inventaire détaillé des biens immobiliers, situés en France ou non et placés dans le trust, avec leur valeur vénale au 1er janvier de l’année.
  • si aucun des settlors ou des bénéficiaires réputés constituants ou si aucun des bénéficiaires n’a son domicile fiscal en France, la déclaration doit aussi faire état de l’inventaire détaillé des biens immobiliers situés en France uniquement et placés dans le trust, avec leur valeur vénale au 1er janvier de l’année.
  • enfin, si le trustee possède son domicile fiscal en France au 1er janvier de l’année d’imposition et qu’aucune des trois premières conditions mentionnées précédemment n’est remplie, il doit déposer une déclaration annuelle comportant toutes les informations stipulées aux points 1° à 5° de l’article 344 G. septies de l’annexe III CGI (soit en particulier les coordonnées complètes du ou des settlors ou bénéficiaires réputés constituants
  • et des bénéficiaires, le contenu des termes du trust notamment l’indication de sa révocabilité ou de son irrévocabilité, de son caractère discrétionnaire ou non, etc.).

Le formulaire 2181-TRUST2 qui conditionne l’exonération du prélèvement sui generis pour les personnes qui ne sont pas redevables de l’IFI doit être remis au plus tard le 15 juin de chaque année (le 15 juillet pour les non-résidents).

Sanctions en cas non-respect des obligations déclaratives du trust

Le non-respect des obligations déclaratives (déclarations événementielles et annuelles) est sanctionné par une amende de EUR 20’000 (article 1736 IV bis CGI).

Le settlor et les bénéficiaires réputés constituants qui entrent dans le champ du prélèvement sui generis sont solidairement responsables du paiement de l’amende avec le trustee (article 1754 V 8 CGI).

Toutefois, une majoration de 80 % des droits s’applique à tous les rappels d’impôt résultant du défaut de déclaration des avoirs placés dans des trusts non déclarés (IFI, IR ou DMTG), à l’exclusion de toute autre majoration ou amende forfaitaire (article 1729-0 A CGI) ! Le montant de cette majoration ne peut être inférieur au montant de l’amende forfaitaire qui aurait été appliquée en cas d’absence de rappels d’impositions.

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Nouvelle jurisprudence du TF en matière de bouclier fiscal à Genève

Le bouclier fiscal ; Ce sujet a déjà fait couler beaucoup d’encre en Suisse et particulièrement à Genève. Les parlementaires s’écharpent régulièrement en la matière faisant ressurgir le clivage gauche/droite.

La raison ? La Suisse est l’un des derniers pays au monde à imposer la fortune. Cet impôt est prélevé au niveau cantonal uniquement et de grandes disparités subsistent entre les cantons (entre 0.25% et 1%). Dans la mesure où avec la situation économique actuelle les rendements de la fortune sont nuls voir négatifs (suite notamment à l’introduction des intérêts négatifs par la Banque nationale suisse), la taxation helvétique se rapproche de la confiscation. Il est en effet fréquent que le rendement de la fortune soit inférieur aux taux d’imposition. Aussi, si ce n’est pas l’imposition au titre du revenu qui pose problème, c’est bien le poids et le cumul de l’impôt sur la fortune qui peut s’avérer confiscatoire.

Genève dispose d’ailleurs de la palme avec un impôt sur la fortune avoisinant les 1% ! C’est donc si l’enjeu est important pour le contribuable.

Pour atténuer l’érosion du patrimoine et l’impact de cette fiscalité très lourde, le peuple genevois a introduit un bouclier fiscal limitant à 60% du revenu net imposable les impôts sur la fortune et le revenu. Il faut y ajouter les 11,5% de l’impôt fédéral direct (IFD). L’imposition totale peut donc atteindre 71,5% du revenu imposable. Afin de lutter contre les risques d’abus, le système prévoit toutefois un revenu théorique minimum de 1% de la fortune nette.

Certains partis de gauche ont déposé dernièrement pas moins de dix projets de loi visant à supprimer, limiter ou suspendre ce mécanisme, au risque de faire fuir les contribuables vers d’autres horizons.

Le débat autour du bouclier fiscal à Genève a déjà fait couler beaucoup d'encre.

Le bouclier fiscal est fondamental à Genève en raison du haut taux d’imposition sur la fortune.

Dans l’attente de l’issue des débats parlementaires à Genève, le Tribunal fédéral a rendu en date du 7 août 2018 deux arrêts en la matière (2C_869/2017 et 2C_870/2017), qui pour une fois sont en faveur du contribuable.

Le Tribunal fédéral a été amené à se prononcer sur le contenu du texte de l’article 60 de la Loi sur l’imposition des personnes physiques genevoise (LIPP), dans des situations où, en raison de charges déductibles non contestées, les contribuables ont déclaré un revenu imposable égal à zéro. En revanche, ces derniers disposaient d’une fortune assez conséquente mais de rendements faibles.

A noter que le terme de « bouclier fiscal » n’apparaît pas en tant que tel dans la LIPP, puisque que la disposition y relative fait simplement référence à une « charge maximale ».

Selon l’article 60 de ladite loi, il est prévu :

« 1. Pour les contribuables domiciliés en Suisse, les impôts sur la fortune et sur le revenu – centimes additionnels cantonaux et communaux compris – ne peuvent excéder au total 60% du revenu net imposable. Toutefois, pour ce calcul, le rendement net de la fortune est fixé au moins à 1% de la fortune nette.

  1. Sont considérés comme rendement net de la fortune, au sens de l’alinéa 1 :
  2. a) les revenus provenant de la fortune mobilière et immobilière, sous déduction des frais mentionnés à l’article 34, lettres a, c, d et e; et

[…]. »

Selon le raisonnement de l’administration fiscale genevoise, suivie par celle de la Cour de justice, afin de calculer la charge maximale d’un contribuable, il y a toujours lieu de prendre en compte un rendement net de la fortune fixé à au moins 1% de la fortune nette, et ce peu importe le rendement réel de celle-ci. Il ressort de ce principe que la charge maximale du contribuable est dans tous les cas au minimum à 60% de 1% de sa fortune nette.

Par exemple : X possède une fortune nette de CHF 10 millions. Les rendements nets de X pour l’année 2017 s’élèvent à CHF 50’000. Dans la mesure où les revenus de X sont inférieurs à 1% de sa fortune nette, la deuxième phrase de l’article 60 al. 1 LIPP/GE s’applique. Le 1% correspond à CHF 100’000. Selon la Cour de justice, la charge maximum de X est de CHF 60’000 (60% de CHF 100’000).

Le Tribunal fédéral a jugé cette interprétation insoutenable et partant arbitraire sous l’angle de l’article 9 Cst. En effet, la loi prévoit seulement que « le rendement net de la fortune est fixé au moins à 1% de la fortune nette ».

Or, l’interprétation de la Cour de justice qui revient à dire que « le revenu net imposable est fixé à au moins 1% de la fortune nette », ne correspond pas aux termes clairs de la loi. La norme prévoit uniquement que la fortune est présumée produire un rendement minimum de 1%. Il s’agit d’éviter par exemple qu’un contribuable décide de placer toute sa fortune dans une société, de thésauriser les revenus de celle-ci et de ne verser aucun dividende. Dans une telle hypothèse sans la précision de la loi la charge maximale serait de CHF 0 (60% du revenu net imposable qui serait de CHF O en l’espèce).

Il ressort de ce qui précède que selon les circonstances, le revenu net imposable peut être inférieur à 1% de la fortune nette par exemple si le contribuable peut faire valoir des déductions (frais d’entretien des immeubles, intérêts hypothécaires, assurance maladie, contribution d’entretien, etc.), comme cela était le cas en l’espèce. Dans l’exemple ci-dessus, si X peut faire valoir des déductions à hauteur de CHF 20’000, la charge maximum sera de CHF 40’000 et non de CHF 60’000.

En conclusion, si dans le calcul du bouclier fiscal, le rendement net de la fortune (qui n’est qu’une composante du revenu net imposable) doit être fixé à au moins 1% de la fortune nette, cela ne signifie pas que le revenu net imposable doive lui-même s’élever à 1% de la fortune nette.

Le Tribunal fédéral relève encore que la loi vaudoise (article 8 LICom/VD), qui a servi de fondement à l’administration fiscale genevoise pour fonder sa décision, est rédigée d’une manière différente et prévoit expressément la non-déduction de certains frais dans le calcul de la charge maximum du bouclier fiscal.

La fiscalité du trust et des sociétés offshores au Royaume-Uni

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Par Lorenzo F. CROCE, avocat aux barreaux de Genève et de Singapour, LL.M., TEP.

Le trust et les dernières nouveautés fiscales en 2017 et 2018.

I) QUELQUES DÉFINITIONS SUR LE TRUST

Un trust peut se définir comme un rapport juridique ayant effet à l’encontre des tiers, qui prend naissance lorsque, sur la base d’un document constitutif (le trust deed), le constituant (le settlor) transfère des valeurs patrimoniales déterminées à une ou plusieurs personnes (les trustees), lesquelles ont l’obligation de les gérer et de les utiliser dans un but établi à l’avance par le settlor en faveur d’un ou de plusieurs tiers (les bénéficiaires).

Le settlor est la personne qui constitue le trust, par un acte juridique entre vifs ou pour cause de mort. Il peut créer un trust irrévocable (irrevocable trust, il s’appauvrit alors définitivement et, en principe, il n’a plus de droits ni d’obligations par rapport au patrimoine du trust) ou révocable (revocable trust, il se réserve ici le droit de révoquer le trust à une date ultérieure et de se faire restituer le patrimoine résiduel, respectivement de faire attribuer celui-ci à un tiers).

Le bénéficiaire est la personne qui bénéficie des prestations du trust. Le settlor peut se désigner lui-même ou désigner toute autre personne physique ou morale comme bénéficiaire. Les valeurs patrimoniales du trust peuvent être transmises au bénéficiaire du vivant du settlor ou après sa mort. Le bénéficiaire dispose de la propriété économique sur le patrimoine du trust (en common law on parle d’equitable interest).

Le trustee a le plein pouvoir de disposition (propriété de droit civil) sur le patrimoine du trust mais il a l’obligation de le gérer au profit des bénéficiaires, en application des dispositions du trust. Dans le cadre de celles-ci, il administre et utilise le patrimoine du trust en son propre nom, en tant que détenteur indépendant du droit à l’égard des tiers, mais séparément de sa propre fortune.
Au Royaume-Uni, on distingue d’un point de vue fiscal, principalement les types de trusts suivants (à noter que certaines catégories peuvent se combiner, on parle alors de mixed trusts) :

– Les « bare trusts » : les avoirs sont détenus au nom du trustee mais le bénéficiaire a le droit de percevoir à n’importe quel moment l’entier des revenus et du capital du trust dès l’âge de 18 ans (16 ans pour l’Ecosse) ;

– Les « interest in possession trusts (IIP) » : le trustee doit ici verser aux bénéficiaires tous les revenus du trust au moment de leur survenance. Ils n’ont en revanche pas de droits sur le capital du trust ;

– Les « discretionary trusts » : dans ce type de trust, le trustee possède une marge d’appréciation quant à l’attribution des revenus et/ou des actifs du trust. Les bénéficiaires n’ont qu’une simple expectative sur les avoirs et la décision de qui, en définitive, doit entrer en possession des attributions du trust, est laissée au trustee ;

– Les « accumulation trusts » : le trustee peut librement décider ou non d’ajouter les revenus perçus du trust au capital de celui-ci ;

– Les « settlor-interested trusts » : le settlor ou son conjoint/partenaire enregistré conserve un intérêt dans le trust (droit d’utiliser les biens, de percevoir des distributions, etc.) ;

– Les « non-resident trusts » : (voir ci-dessous sous II)) pour une définition) ;

– Les « trusts for vulnerable people » : on vise ici les trusts pour les orphelins ou les personnes handicapées. Ils bénéficient d’un régime de taxation particulier qui ne sera pas abordé ici.

II) LA RÉSIDENCE FISCALE DU TRUST AU ROYAUME-UNI

Depuis 2007, les trusts sont considérés comme une entité fiscale distincte au Royaume-Uni. La résidence fiscale du trust aura un impact pour l’impôt sur le revenu et celui sur les gains en capitaux. S’agissant de l’impôt sur les successions, c’est en revanche la résidence/le domicile du settlor et le lieu de situation des biens qui est déterminant.

Un trust sera résident au Royaume-Uni si :

– Tous les trustees sont résidents dans ce pays ; OU

– Il y un mélange de trustees résidents et non-résidents et le settlor est lui-même résident, domicilié ou deemed domiciled au Royaume-Uni à la date de constitution du trust (c’est-à-dire à la date de la mort du settlor en cas de trust constitué par testament ou à la date du trust deed ou lors de l’attribution des biens (y compris en cas d’ajout subséquent de biens) au trust pour les inter vivos trusts).

Dans tous les autres cas, le trust sera considéré comme offshore (non-resident trust).

Une attention particulière doit être faite s’agissant des trustees professionnels (soit ceux qui déploient leur activité contre une rémunération) qui exploitent une agence, une succursale ou un établissement stable au Royaume-Uni afin de ne pas remettre en cause la résidence offshore du trust. Afin d’éviter une requalification, la gestion du trust ne doit en aucun cas être entreprise depuis le Royaume-Uni.

De même, il convient de prendre garde à un possible changement de résidence accidentel du trust en cas de décès de l’un des trustees ou de déménagement de ceux-ci par exemple. A cet égard, lorsqu’un trustee résident se retire en faveur d’un trustee non-résident, cela entraine un impôt sur les gains en capitaux calculé sur les biens du trust évalués à leur valeur de marché (export charge). L’impôt est dû par le trustee qui résilie son mandat. Celui-ci doit remplir une déclaration fiscale dans les 12 mois dès le départ du trust.

Enfin, en cas de décès de l’un des trustees, il n’y pas d’export charge si le trustee anglais est remplacé par un autre trustee résident dans les 6 mois dès sa mort (le trust pourrait se retrouver de fait non-résident pendant ce laps de temps) à condition qu’aucun bien n’ait été disposé. La réciproque est également vraie (trust non-résident qui devient résident pendant un certain temps).

III) L’IMPÔT SUR LES SUCCESSIONS (IHT)

L’impôt sur les successions concerne uniquement les personnes domiciliées ou réputées domiciliées (deemed domicilied) au Royaume-Uni (voir notre brochure sur la taxation des Res Non Dom au Royaume-Uni pour une explication des diverses notions ainsi que des changements législatifs qui sont intervenus en 2017).

S’agissant des trusts, c’est le statut du settlor (et non celui du trustee ou des bénéficiaires) au moment de la création du trust ainsi que le lieu de situation des biens qui est déterminant.
L’impôt sur les successions dans le cadre d’un trust dépend de son type : ainsi, on distingue principalement le Relevant Property Trust (RPT), le Qualifying Interest In Possession Trust (QIIP) et l’Excluded Property Trust (EPT). Il existe encore d’autres types de trusts où des règles spéciales s’appliquent comme les trusts charitables, les bare trusts (le trust est considéré comme transparent en faveur des bénéficiaires), les trusts pour les personnes handicapées, ceux post mortem en faveur de mineurs (pas d’IHT) ou encore lorsque les bénéficiaires ont moins de 25 ans (RPT sans la taxe dite « anniversaire » des 10 ans, voir ci-dessous).

Le RPT concerne principalement tous les trusts discrétionnaires constitués du vivant ou au décès du settlor et pratiquement tous les inter vivos trusts (peu importe le type) créés depuis le 22 mars 2006 (sauf les bare trusts et les disabled trusts). Dans cette hypothèse, l’imposition intervient comme suit (Relevant Property Regime) :

– Au moment du transfert des biens dans le trust, un Lifetime Chargeable Tranfer (LCT) intervient à hauteur de 20% pour les sommes qui vont au-delà du montant du Nil Rate Band (£325’000). Une taxe additionnelle est due à hauteur de 20% en cas de décès du settlor dans les 7 ans (pour de plus amples informations nous vous invitons à consulter notre brochure sur la fiscalité des Res Non Dom au Royaume-Uni).

– Chaque 10 ans dès la date de création du trust (et non celle où les biens sont mis en trust), un impôt à hauteur maximum de 6% est dû sur la valeur des biens du trust (on notera qu’il n’est pas possible de créer un nouveau trust afin d’échapper à cet impôt dit « anniversaire »). Le taux est réduit si le trust n’est pas un RPT pendant la durée totale des 10 ans.

– Une « exit charge » à hauteur de maximum 6% du capital du trust doit être payée lors des distributions aux bénéficiaires, cette taxe étant proportionnelle au temps écoulé depuis la dernière période de 10 ans.

L’QIIP Trust est un trust IPP (soit un trust dans lequel l’un des bénéficiaires au moins a un droit fixe aux versements des revenus de celui-ci lorsqu’ils surviennent) qui remplit l’une des conditions alternatives suivantes :

– Le trust a été créé avant le 22 mars 2006 et il n’y a pas eu de changement de bénéficiaire (le life tenant) depuis ou un changement est intervenu avant le 6 avril 2008 selon des règles transitoires (transitional serial interest) (des règles spéciales s’appliquent pour les époux/ses du life tenant décédé) ;

– Le trust, créé par testament ou par application des règles successorales, qui prend effet immédiatement à la mort du settlor (peu importe qu’il soit constitué avant ou après le 22 mars 2006) (immediate post-death interests).

Si les conditions sont remplies, le trust est taxé comme si les biens appartiennent au life tenant. Dès lors l’IHT est dû par le trust à la mort du life tenant ou dès qu’il perd son droit fixe (l’impôt sur les donations est alors dû comme suit : LCT si le trust continue ou PET (Potentially Exempt Transfer) si le trust se termine sauf si le transfert des biens est effectué au life tenant lui-même). Dans le cas contraire, le trust est traité comme un RPT. A noter qu’aujourd’hui tous les nouveaux trusts constitués du vivant du settlor sont des RPT ou des EPT (voir ci-dessous).

Un EPT est un trust (ce peut être un QIIP ou un RPT) constitué par un settlor qui n’est pas domicilié (ou deemed domiciled) au Royaume-Uni à la date de sa création et qui contient des biens non britanniques (il est possible d’avoir un mélange de biens locaux et étrangers mais dans cette hypothèse, les biens locaux seront soumis à l’IHT). La résidence du trustee et celle des bénéficiaires n’est pas relevante.

Le settlor peut également lui-même être bénéficiaire du trust sans être soumis aux règles sur le Gift with Reservation Of Benefit (GROB) et cela même après qu’il soit devenu domicilié au Royaume-Uni, à condition bien entendu que les biens demeurent offshore (les règles sur le GROB prévoient que si le settlor continue de bénéficier de l’usage des biens du trust, ces derniers restent soumis à la succession du settlor ou dans le cas où celui-ci cesserait d’être un bénéficiaire du trust, un PET soumis au délai des 7 ans intervient).

Si les conditions mentionnées ci-dessus sont remplies, les biens du trust ne sont pas soumis à l’IHT et ce pour une durée indéterminée (tant que les biens ne sont pas rapatriés dans le pays). Peu importe par ailleurs la forme du trust (discrétionnaire, révocable, fixed interest, etc.).

Dans l’idéal, il est judicieux de constituer le trust et d’effectuer le transfert des biens avant la prise de résidence du settlor au Royaume-Uni afin d’éviter toute discussion ultérieure.

En cas d’ajout subséquent de biens dans le trust alors que le settlor est dans l’intervalle devenu domicilié ou deemed domiciled au Royaume-Uni, on retiendra un LCT (entry charge) taxable à hauteur de 20% (sous réserve du montant du Nil Rate Band). S’agissant de l’exit charge et de l’impôt anniversaire des 10 ans (voir ci-dessus), il semblerait qu’ils soient dus mais la position de l’HMRC est controversée. En revanche, le trust ne perd en tous les cas pas l’entier de son statut d’EPT si les biens soumis à l’IHT sont séparés des autres avoirs exemptés. Nous déconseillons toutefois d’ajouter des biens dans le trust après être devenu domicilié dans le pays.

Il convient également de ne pas transformer des biens étrangers en biens locaux par exemple par l’achat d’actions de sociétés anglaises (dans ce cas les actions sont soumises à l’exit charge et à la taxe anniversaire). Il est toutefois possible de corriger cette « erreur » avant qu’un évènement entrainant l’IHT survienne (date anniversaire ou distribution aux bénéficiaires). A noter que depuis avril 2017, il n’est plus possible pour un EPT de détenir les actions d’une société qui détient elle-même un immeuble résidentiel au Royaume-Uni. Dans cette hypothèse, l’IHT sera dû par le trustee à compter du 6 avril 2017. Aussi, les règles sur le GROB s’appliqueront dans cette hypothèse, exposant le settlor à payer au final tant la taxe anniversaire des 10 ans que l’IHT en cas de décès.

Enfin, si certaines conditions sont remplies certains biens britanniques tombent en toute hypothèse sous le coup du régime de l’EPT, à savoir les comptes bancaires ouverts auprès d’une banque locale dans une monnaie étrangère, les bons du trésor britannique, certains fonds de placement (unit trusts), etc.

Au niveau du compliance, le trustee a l’obligation d’informer les autorités fiscales (formulaire IHT 100) lors de tout événement pouvant entrainer une taxation sous l’angle de l’IHT (exit charge, taxe anniversaire, LCT, etc.). En théorie, les trustees doivent soumettre aux autorités un « inheritance tax account » en toute hypothèse, bien qu’une exemption puisse s’appliquer ou non. En pratique, cette incombance n’est pas toujours imposée si le trust est totalement exempté (EPT).

Par ailleurs, toute personne qui intervient professionnellement dans la constitution d’un trust offshore (les EPT ne sont pas concernés) doit informer l’HMRC dans les 3 mois dès la constitution de celui-ci, s’il estime que le settlor est domicilié au Royaume-Uni et que le trustee n’est pas résident dans le pays.

A noter que depuis avril 2017, les personnes ayant eu un domicile d’origine au Royaume-Uni ne peuvent plus bénéficier du régime de l’EPT (s’ils ont été résidents pendant au moins une année au cours des deux dernières années fiscales), même si le trust est constitué alors que le settlor est résident à l’étranger (dans ce cas, le trust est considéré comme un RPT pour les années où le settlor est résident au Royaume-Uni).

En revanche, le fait que depuis 2017 les contribuables résidents mais non-domiciliés au Royaume-Uni deviennent deemed domiciled après 15 années de séjour sur le territoire est sans conséquence pour les EPT créés avant d’acquérir ce statut.

IV) L’IMPÔT SUR LE REVENU EN MATIERE DE TRUST

A) Du point de vue du trustee

En présence d’un trust offshore, le trustee ne paiera l’impôt que sur les revenus de source britannique. A l’inverse, le trustee d’un trust résident sera taxé sur les revenus mondiaux.

S’agissant du taux, il dépendra du type de revenu considéré, de la structure du trust et de la résidence des bénéficiaires. Ainsi, dans le cadre d’un discretionary trust ou d’un accumulation trust, le taux basique sera applicable au premier £1’000 de revenu taxable puis un taux de 38.1% s’agissant des dividendes et de 45% pour les autres types de revenu, après déduction des coûts (si le trust est non-résident, seuls les coûts liés aux revenus de source locale sont déductibles). La personal savings allowance et la dividend allowance ne sont pas disponibles au trustee.

Si aucun bénéficiaire ou bénéficiaire potentiel d’un trust offshore n’est résident au Royaume-Uni pendant l’année fiscale considérée, les dividendes et les intérêts de source anglaise sont exonérés.
Dans l’hypothèse d’un interest in possession trust (IIP), les dividendes sont imposés à hauteur de 7.5% et les autres revenus à 20%. Si le bénéficiaire est taxé à un taux supérieur, il lui appartient ensuite de payer la différence entre son propre taux d’imposition et celui applicable au trust.

En toute hypothèse, nous déconseillons aux trusts offshores d’investir dans des biens situés au Royaume-Uni.

B) Du point de vue du settlor

En présence d’un settlor-interested trust, soit d’un trust par lequel le settlor ou son épouse, résidents au Royaume-Uni, sont eux-mêmes bénéficiaires du trust (ou potentiellement bénéficiaires ce qui inclus l’hypothèse où le trustee a le pouvoir de les rajouter sur la liste des bénéficiaires), une imposition en transparence se produit (règles du « settlements code », chapter 5, part 5 ITTOIA 2005). En clair, le settlor résident au Royaume-Uni reste imposé aux taux habituels sur les revenus du trust comme si la structure n’existait pas. Peu importe que le trust soit résident ou non et l’impôt concerne les revenus mondiaux. Avant 2017, si le settlor était soumis à la taxation selon la remise, seuls les revenus étrangers rapatriés étaient soumis à taxation (les revenus locaux étaient bien entendu toujours taxés). Depuis le 6 avril 2017, cette règle ne s’applique plus (voir toutefois ci-dessous pour les nouvelles règles particulières mise en place en faveur des Res Non Dom).

Il est donc généralement conseillé d’exclure expressément le settlor et son conjoint comme bénéficiaires dans le trust deed. A noter que ce régime s’applique (imposition du settlor) également si des versements sont effectués en faveur d’un enfant célibataire de moins de 18 ans et cela même si le settlor et son conjoint sont exclus.

Par ailleurs, le régime demeure applicable même si le settlor ou son époux/se, bien que non-bénéficiaires, reçoivent une somme en capital résultant par exemple d’un prêt (peu importe que ce prêt soit rémunéré ou non).

S’agissant du settlor non-résident, ce dernier ne sera taxé que sur les revenus de source britannique.

En pratique, le reporting peut être très complexe notamment s’agissant des trusts discrétionnaires puisqu’il appartient au trustee de payer les impôts dus (revenus de source anglaise taxés à 38.1% ou à 45%) puis le settlor bénéficiera d’un crédit d’impôts (il devra éventuellement rembourser au trustee le trop-payé puisque l’HMRC le remboursera directement s’il est taxé à un taux inférieur).

Enfin, on relèvera qu’en cas de conflit de contribuable (par exemple entre le settlor et les bénéficiaires qui reçoivent une distribution), la règle ci-dessus s’applique toujours en priorité.

On relèvera que depuis avril 2017, tant les règles du « settlements code » que les « transferor provisions » ont perdu de leur importance en ce qui concerne les Res Non Dom.

En effet, à partir du 6 avril 2017, les personnes qui résident au Royaume-Uni pendant 15 ans au cours des 20 dernières années (c’est-à-dire dès la 16ème année fiscale) ne peuvent plus bénéficier du régime de l’imposition selon la remise (les personnes ayant eu un domicile d’origine sont aussi concernées par cette mesure dès leur retour dans le pays). Elles sont ainsi considérées comme deemed domiciled pour toutes les taxes et pas uniquement pour l’impôt sur les successions (pour plus de détails, nous vous invitons à consulter notre brochure sur la taxation des Res Non Dom au Royaume-Uni).

S’agissant des trusts, cette réforme a eu un impact à la fois sur l’imposition des revenus et sur les gains en capitaux.

A cet égard, la loi a introduit un nouveau concept, celui de « protected trust », soit les trusts offshores constitués alors que le settlor non-domicilié n’était pas deemed domiciled au moment de la création (soit tous les trusts constitués avant le 6 avril 2017 par une personne non-domiciliée selon les règles ordinaires (peu importe ainsi que la personne à la date de la constitution soit réputée domiciliée selon l’impôt sur les successions ou ait résidé au Royaume-Uni pendant plus de 15 ans) ainsi que les trusts créés après cette date par une personne non-domiciliée et qui n’est pas réputée domiciliée dans ce pays à la date de la constitution). A noter que les personnes ayant eu un domicile d’origine ne peuvent pas bénéficier du régime accordé aux protected trusts.
Si les conditions sont remplies, le « settlements code » de même que les « transfer of assets abroad provisions » (voir ci-dessous) ne s’appliquent pas aux trusts et aux underlying companies tant que ce statut est maintenu.

La loi prévoit alors aucune imposition (sur le revenu étranger et tous les gains en capitaux) tant qu’aucune distribution n’est effectuée aux bénéficiaires (peu importe que l’on se trouve dans un settlor-interested trust ou que le settlor devienne deemed domicilied par la suite). On applique le principe dit des « matching rules » (voir ci-dessous).

Toutefois, cette protection est accordée à condition que :

– Il n’y a pas eu d’ajout de biens supplémentaires comme par du revenu ou autre (sauf exception par exemple si la transaction intervient selon le principe de « pleine concurrence » ou si le settlor rembourse des frais du trust alors que celui-ci est déficitaire) par le settlor (ou par un autre trust où le settlor est lui-même settlor ou bénéficiaire) dans le trust depuis que ce dernier est devenu deemed domiciled (un ajout alors que le settlor a subséquemment perdu ce statut suite à une période de non résidence est possible) ou si les conditions sont déjà remplies lors de l’entrée en vigueur de la loi (plus de 15 ans de résidence du settlor), à partir du 6 avril 2017 (« tainted trust ») et que,

– Le settlor n’ait pas acquis un domicile au sens général (ou selon la règle du returning UK domicile) au Royaume-Uni.

S’agissant des revenus de source étrangère, le settlor sera directement imposé lors d’une distribution en sa faveur ou en faveur de ses proches tels que son conjoint, son concubin et ses enfants mineurs, uniquement si le bénéficiaire n’est pour une raison ou pour l’autre pas taxé au Royaume-Uni (par exemple, il est non-résident ou taxé selon le principe de la remise mais les revenus ne sont pas rapatriés, etc.). S’il est deemed domiciled au Royaume-Uni, le settlor sera imposé selon le régime ordinaire (distribution de revenus mondiaux) tandis que s’il est un Remittance Basis User non-réputé domicilié, il sera taxé uniquement si les revenus sont rapatriés au Royaume-Uni. A noter que le settlor ne sera taxé que pour la part de revenu obtenue après le 6 avril 2017 et alors qu’il était résident au Royaume-Uni.
En cas de distribution à un bénéficiaire tiers (c’est-à-dire à une personne qui n’est pas le settlor, son conjoint, ses enfants mineurs ou son concubin), les règles sur les matching rules s’appliquent pleinement à ce tiers (voir ci-dessous).

En résumé, les règles du « settlements code » ne s’appliqueront plus qu’aux trusts constitués par des personnes domiciliées au Royaume-Uni selon les règles générales, les trusts qui ne bénéficient pas du statut de protected trust et les revenus de source anglaise.

Il est probable que les règles anti-abus (mentionnées ci-dessous) auxquelles sont soumises les gains en capitaux (anti-conduit rules) s’agissant des donations faites à une personne taxée au Royaume-Uni suite à une distribution à un individu résidant offshore s’appliquent également aux revenus.

On notera également que les revenus capitalisés dans le trust avant avril 2017 bénéficient également du nouveau régime. Si ceux-ci ont déjà été taxés, il n’y a pas de nouvelle taxation.

Hormis les règles sur le settlements code, d’autres normes sont susceptibles de s’appliquer au settlor subsidiairement, les « transferor provisions » (sections 720 et 727 ITA 2007). Ce sera notamment le cas dans l’hypothèse où il y a une underlying company du trust qui génère les revenus et non le trust lui-même (le settlements code s’applique uniquement aux trusts eux-mêmes).

L’idée est ici d’éviter que le settlor puisse échapper à tout impôt en transférant des biens (on parle de « relevant transfer », soit un transfert de biens à une personne située à l’étranger qui devient le sujet taxable) à un trust offshore et auquel les règles sur le settlements code ne s’appliquent pas. Dès que le settlor ou son conjoint, résident au Royaume-Uni (uniquement dans cette hypothèse à la différence du settlements code où dans le cadre d’un settlor non-résident, les revenus de source britannique sont toujours imposés entre ses mains), a un pouvoir de jouissance sur le trust (power to enjoy, qui peut s’exprimer en termes de revenu, de capital, d’utilisation des biens, etc.), tous les revenus de l’underlying company sont attribués au settlor. Cette règle ne s’applique pas si ce dernier est soumis au régime de la remise et que le revenu n’est effectivement pas rapatrié dans le pays.

Il existe toutefois des moyens de défense (motive defence : section 737 ITA 2007) ; Si les conditions sont remplies aucun revenu ne peut être imputé au settlor. C’est le cas si :

– Il est possible de prouver qu’aucun des buts visés par le transfert n’est d’économiser des impôts au Royaume-Uni ; ou

– Le transfert correspond à une transaction commerciale effectuée de bonne foi (peu importe ici qu’économiser des impôts soit un but ou même l’objectif principal) ; ou

– S’agissant des transactions effectuées après le 6 avril 2012, il peut être objectivement prouvé qu’une imposition violerait certains aspects du droit européen.

Il appartient au settlor de prouver que l’une ou l’autre de ces conditions est remplie ce qui peut être difficile en pratique.

Depuis 2017, les transferor provisions s’appliquent uniquement aux revenus de source anglaise ou aux trusts qui ne bénéficient pas ou plus du statut de « protected trust ». Ainsi, les underlying companies sont considérées comme totalement opaques s’agissant des revenus offshores (on applique alors les nouvelles règles sur les trusts), y compris en ce qui concerne le revenu obtenu avant le 6 avril 2017.

C) Du point de vue du bénéficiaire

Sous réserve de l’imposition du settlor dans le cadre des règles mentionnées ci-dessus (settlements code ou transferor provisions), le bénéficiaire est imposé directement dans le cadre d’un IIP Trust (peu importe que le revenu soit effectivement remis ou non) selon sa résidence/son domicile ainsi que son statut (arising basis ou remittance basis). Les impôts déjà payés par le trustee sont déduits. Si le bénéficiaire est taxé selon la remise, il sera imposé dans le cadre d’un rapatriement, au taux de 20%, 40% ou 45%, peu importe la source de revenu (dividendes, etc.).

Dans le cadre d’un trust discrétionnaire, le bénéficiaire jouit d’un crédit d’impôt à hauteur de 45% et peut, à certaines conditions, demander le remboursement s’il appartient à la catégorie de contribuable imposée à un taux plus bas (au taux de 20% ou 40% par exemple, à noter qu’il n’y a pas non plus de distinction selon la source de revenu (dividendes, etc.)). Le crédit d’impôt n’est pas automatique pour les trusts non-résidents. Si le bénéficiaire Res Non Dom est imposé selon le régime de la remittance, il sera taxé uniquement si les fonds sont rapatriés au Royaume-Uni.

Enfin les « non-transferor rules » (section 731 ITA 2007) s’appliquent subsidiairement dans certaines circonstances si le settlor n’a pas été soumis au settlements code ainsi qu’aux transferor provisions. Pratiquement, cela concerne aujourd’hui les trusts discrétionnaires où le settlor n’a pas gardé d’intérêts dans le trust et dès avril 2017 tous les protected trusts. En effet, il s’agit d’éviter que le revenu accumulé ne soit jamais imposé puisqu’il est stocké à l’étranger.

Le bénéficiaire, résident au Royaume-Uni, est ainsi taxé (aux taux de 20%, 40% ou 45% selon), sur les revenus capitalisés (revenu disponible après le paiement des frais et le versement des autres distributions) du trust au moment de la distribution. On dit que du « capital benefit is matched with relevant income in the trust » (matching rules). Il est important de relever que d’un point de vue fiscal, les revenus acquis mais non distribués aux bénéficiaires durant l’année fiscale sont considérés comme du revenu les années subséquentes malgré le fait qu’ils soient capitalisés. En cas de distributions supérieures aux revenus capitalisés, l’imposition du solde est reportée aux années subséquentes. Enfin, le revenu est taxé en priorité par rapport aux gains en capitaux dans le cadre d’une distribution. On distribue ainsi d’abord le revenu avant les gains en capitaux. La tenue des comptes est ici très importante et les coûts d’administration se font ressentir également. A noter que les bénéficiaires peuvent déduire leur annual personal allowance.

Ainsi, si un trust perçoit l’année 1 des revenus de 10 (non taxable), l’année 2 des revenus de 20 (non taxable) et l’année 3 des revenus de 15. L’année 3, il distribue 50 à X, résident au Royaume-Uni, les 45 seront taxables dans les mains du bénéficiaire et il restera un solde de 5 qui sera taxé l’année suivante chez le bénéficiaire sur les nouveaux revenus du trust.
A noter que si les bénéficiaires sont non-résidents, ils ne sont pas soumis à la beneficiary charge. Toutefois, le trust ne peut pas bénéficier des matching rules en faveur des bénéficiaires résidents (absence de « wash out »).

Enfin, depuis avril 2018, en cas de versement effectué à un non résident qui n’est pas un proche du settlor, suivi d’une donation dans les trois ans à un résident au Royaume-Uni, il y aura une imposition directement entre les mains de ce dernier (« onward gift rule »). Il faut toutefois démontrer qu’au moment du premier versement, il y avait une intention de favoriser au final le résident au Royaume-Uni.

On relèvera encore que si les motive defence mentionnées ci-dessus s’appliquent, aucun impôt sur le revenu ne peut être imputé au bénéficiaire sur le revenu accumulé. Les bénéficiaires seront alors imposés lors d’une distribution selon le régime de la beneficary charge applicable aux gains en capitaux (voir ci-dessous).

Il convient de maintenir une bonne comptabilité afin que le settlor et les bénéficiaires puissent déclarer les revenus nécessaires à l’HMRC. En présence d’un settlor ou d’un bénéficiaire au Royaume-Uni, les autorités fiscales peuvent exiger du trustee qu’il donne des informations (via le formulaire 50 (FS)) détaillées sur les revenus du trust, les gains en capitaux, les distributions, etc.
On relèvera que certains investissements dans des fonds offshores (« non-reporting offshore funds ») sont considérés comme du revenu et non des gains en capitaux (Offshore Income Gains). En effet, la vente de telles parts de fond est soumise à des règles spéciales très complexes.

V) L’IMPÔT SUR LES GAINS EN CAPITAUX EN MATIERE DE TRUST

A) Du point de vue du trustee

Le trustee d’un trust non-résident n’est pas imposé sur les gains en capitaux tant locaux qu’étrangers. En effet, les gains en capitaux ne sont, par définition, taxables que pour les résidents au Royaume-Uni.

Au fil des années, l’HMRC a introduit de très nombreuses exceptions afin d’éviter les abus si bien qu’aujourd’hui les trusts ne sont plus aussi intéressants que par le passé. Par ailleurs, les coûts administratifs impliqués sont élevés.

A noter que depuis avril 2015, les plus-values de propriétés situées au Royaume-Uni et détenues par un trust offshore sont taxées entre les mains du trustee à hauteur de 28% (NRCGT). Une proposition visant à taxer tous les gains en capitaux sur des biens immobiliers situés au Royaume-Uni à compter d’avril 2019, y compris ceux détenus par un trust offshore, est également à l’étude.

B) La settlor charge (section 86 TCGA 1992)

Tout settlor résident et domicilié (depuis le 6 avril 2017, le settlor « réputé domicilié » est également concerné sous réserve des exceptions mentionnées ci-dessous et applicables aux protected trusts) au Royaume-Uni est taxé (à hauteur de 10% ou 20% après déduction des déductions personnelles, déductions annuelle, etc.) sur les gains en capitaux du trust non-résident, peu importe qu’une distribution soit intervenue ou non. A contrario, bien qu’imposé selon le régime ordinaire, un Res Non Dom n’est pas imposé sur les gains en capitaux du trust (étranger et local).

Des exceptions s’appliquent en cas de distributions faites après le 6 avril 2008 à une personne résidente (une relevant person) au Royaume-Uni. En effet, le settlor peut se voir imposer sur le gain en capital accumulé mais non réalisé avant le transfert du bien dans le trust (section 809T ITA 2007). On parle de « foreign pregnant assets transfered without full consideration ». Il est dès lors plus prudent de constituer un trust offshore qu’avec du clean capital.

A noter que la NRCGT, payée par le trustee, à la priorité sur la settlor charge. Par ailleurs, cette dernière ne s’applique que si le settlor conserve un intérêt dans le trust (settlor-interested test). La notion est toutefois très large (elle est plus étendue que pour la taxation des revenus du trust) et englobe hormis le settlor, son conjoint, les enfants mineurs et majeurs du settlor et du conjoint ainsi que leur époux/se et les petits-enfants et leur conjoint de même que les sociétés contrôlées par l’une de ces personnes.

En résumé, il convient d’être très prudent et d’évaluer chaque année la situation du settlor afin de déterminer s’il est domicilié ou non au Royaume-Uni. Par ailleurs, il faut être prudent lors des distributions s’agissant des bénéficiaires afin de s’assurer qu’ils ne soient pas des relevant persons.

Depuis le 6 avril 2017, un nouveau régime a été mis en place pour les protected trusts (voir ci-dessus pour la notion), soit dans les situations où le settlor est devenu deemed domiciled au Royaume-Uni. Comme pour les revenus étrangers, tant que le gain en capital est conservé dans le trust, il n’y aura pas d’imposition (sous réserve des cas où le trust serait « tainted »). La settlor charge n’est donc pas applicable dans cette hypothèse et concerne tant les gains en capitaux locaux qu’étrangers. Pour rappel, les settlors avec un domicile d’origine au Royaume-Uni, ne peuvent pas bénéficier de ce régime et seront imposés en transparence dès leur retour au Royaume-Uni.

Lors d’une distribution faite à une personne « tierce » qui n’est pas le settlor, son conjoint, un concubin ou un enfant mineur, il n’y a pas d’imposition si cette dernière est non-résidente ou résidente mais non-domiciliée (ou deemed domiciled), imposée selon le principe de la remise et que les gains ne sont pas rapatriés au Royaume-Uni (voir ci-dessous).

En cas de distribution du trust (à compter du 6 avril 2018) au settlor ou à ses proches (conjoint, concubin, enfants mineurs mais non les petits-enfants), l’imposition interviendra comme suit selon les matching rules (peu importe que le trust soit un protected trust ou non) :

– Le bénéficiaire (ou le settlor s’il reçoit lui-même la distribution) sera imposé entre ses mains s’il est résident et domicilié ou deemed domiciled au Royaume-Uni. Ce sera également le cas s’il est non-domicilié mais résident taxé selon le régime ordinaire ou selon le principe de la remise si les fonds sont rapatriés. Dans cette hypothèse, le settlor n’est pas taxé.

– Si le bénéficiaire est un non-résident ou un résident non-domicilié taxé selon le principe de la remise et que les fonds ne sont pas rapatriés au Royaume-Uni, le settlor résident sera alors imposé en priorité, en fonction de son statut de domicilié, de réputé domicilié (taxation en plein dans les deux hypothèses) ou de résidence (régime ordinaire ou de la remise). Il n’y aura bien entendu pas de double imposition en cas de rapatriement subséquent au Royaume-Uni par le bénéficiaire.

C) La beneficiary charge (section 87 TCGA 1992)

Si la settlor charge ne s’applique pas (par exemple pour les protected trusts dès 2017, si le settlor est résident mais non domicilié ou encore non résident), l’impôt sur les gains en capitaux peut être imputé aux bénéficiaires résidents lors des distributions. Il faut alors qu’un « capital payment from the trust is matched with trust gains ».A noter que les motive defence ne s’appliquent pas ici.

La notion de capital payment est très large et inclut tous les versements qui ne sont pas du revenu taxable. Cela concerne, outre les versements d’espèces, les avantages conférés en nature (droit d’utilisation, etc.), les prêts sans intérêts, etc. Dans ces hypothèses, l’avantage conféré (par exemple la différence entre le loyer de l’appartement effectivement payé et celui que payerait un tiers) est considéré comme un gain en capital. A noter que le Gouvernement de Sa Majesté a introduit des règles précises pour apprécier les avantages en nature conférés à un bénéficiaire (benefits in kind), notamment par l’introduction de taux officiels (en l’état 2,5%), y compris pour les prêts d’œuvres d’art par exemple (prix d’acquisition de l’œuvre multiplié par un certain taux).

S’agissant des trust gains, ils comprennent tous les gains en capitaux qui seraient réalisés si le trustee était résident au Royaume-Uni (section 2(2) TCGA 1992). Bien entendu, les pertes du trust peuvent être déduites. En revanche, aucune exemption annuelle ne s’applique. A noter que certains événements entraînent une réévaluation des biens et partant sont susceptibles de provoquer un gain en capital : on citera par exemple la relocalisation du trustee à l’étranger, le transfert dans un nouveau trust ou encore la distribution en nature d’un bien du trust à un bénéficiaire.

A compter du 6 avril 2015, les gains en capitaux provenant de la vente de biens immobiliers (NRCGT) ne sont pas compris dans les trust gains et les matching rules ne s’appliquent pas (le trustee est imposé directement).

Au niveau des règles de taxation, elles sont les mêmes que pour l’imposition des revenus (l’excès de gains en capitaux est reporté aux années subséquentes de même que l’excès de distributions). Par ailleurs, les derniers gains en capitaux acquis et distribués sont imposés en premier (méthode LIFO).

Les distributions à des bénéficiaires non-résidents ne sont pas taxables bien qu’ils soient pris en considération dans les matching rules (ainsi, il peut être intéressant de distribuer la totalité des gains en capitaux au bénéficiaire non-résident l’année précédente (pas d’impôt), puis de distribuer le capital initial l’année suivante au bénéficiaire résident au Royaume-Uni). Ce régime très favorable a toutefois disparu (anti-“washing out” provisions pour tous les trusts) en 2018.

Les distributions d’un trust offshore en faveur de la charité sont également exemptées d’impôt mais prisent en considération dans les matching rules.

Le taux d’imposition est de 10% ou 20% selon les gains en capitaux/revenus totaux du bénéficiaire. Toutefois, l’imposition peut s’élever à 32% dans certaines circonstances (supplementary charge). C’est le cas lorsque les gains en capitaux ne sont pas distribués durant l’année d’acquisition ou l’année subséquente (chaque année de « retard » entraine une surtaxe de 10% (sur le taux de 10% ou 20% selon les cas) à partir de l’année d’acquisition jusqu’au taux maximum de 32% après 6 ans ; par exemple, si le versement intervient dans la 4ème année, on paie une surcharge correspondant à 3 années soit 3% ou 6% de surtaxe). Le but de la mesure est de forcer le trustee à distribuer les gains en capitaux plutôt qu’à thésauriser.

On relèvera que les personnes résidentes au Royaume-Uni mais taxées selon le principe de la remise ne sont pas imposées tant que les gains en capitaux ne sont pas rapatriés dans le pays (peu importe que les biens à l’origine du gain se situent au Royaume-Uni ou non). Il peut donc valoir la peine de choisir le régime de la remise l’année où le trust entend faire une distribution à un Res Non Dom à partir d’une plus-value en capital. Il existe par ailleurs une exonération sur les gains en capitaux accumulés mais non réalisés avant le 6 avril 2008 et versés à des RND aux Royaume-Uni (le bénéficiaire ne sera taxé que sur les gains postérieurs à cette date). Le trustee doit toutefois demander l’application de cette exonération (rebasing election via le formulaire RB1) avant le 31 janvier qui suit l’année fiscale où la distribution a été faite.

Il n’est pas possible de compenser des pertes personnels avec la beneficiary charge. Le montant de l’exemption annuelle peut en revanche être utilisé.

On notera que le gouvernement a introduit une clause anti-abus dès 2018 dans l’hypothèse où une distribution est faite à une personne non taxable au Royaume-Uni (une personne tierce non-résidente au Royaume-Uni ou un Remittance Basis User qui n’est ni un proche du settlor ou le settlor lui-même n’est pas résident) puis que cette dernière fasse une donation ou un prêt gratuit (ou à un taux en dessous du prix du marché) à un bénéficiaire sujet à taxation au Royaume-Uni dans un délai de 3 ans. Dans cette hypothèse, le bénéficiaire final sera considéré comme celui qui a reçu la distribution.

Au-delà des aspects fiscaux, il convient toujours de prendre en compte les coûts liés à l’administration de la structure qui peuvent être considérables.

Il est très important pour le trustee de tenir une comptabilité appropriée afin de ne pas faire d’erreurs et éventuellement de profiter des avantages conférés par la loi. A cet égard, il peut être utile pour le trustee de remplir la form 50(FS) et de la garder au cas où elle serait demandée par les autorités. Par ailleurs, il faut toujours être certain de la résidence des bénéficiaires et du domicile du settlor.

VI) LA RÉSIDENCE FISCALE DES SOCIÉTÉS AU ROYAUME-UNI

Les sociétés offshores (c’est-à-dire non-résidentes) ne sont généralement pas taxées sur le bénéfice et les gains en capitaux au Royaume-Uni, sauf si elles exploitent un établissement stable dans ce pays. A noter qu’un projet de loi vise à imposer les sociétés offshores sur les revenus et les gains en capitaux provenant de biens immobiliers situés au Royaume-Uni dès 2020.

Les sociétés locales sont en revanche taxables sur l’ensemble de leurs bénéfices mondiaux, ce qui implique de porter une attention particulière à la résidence fiscale de la société pour éviter toute mauvaise surprise.

Dans la règle, une société incorporée au Royaume-Uni sera considérée comme locale.

Par ailleurs, une société étrangère dont la gestion et le contrôle (central management and control) est situé au Royaume-Uni sera également considérée comme locale. Cette notion n’est pas définie dans la loi mais par la jurisprudence.

Par « management and control », on se réfère à la gestion au plus haut niveau de la société, à savoir généralement celle exercée par le conseil d’administration (mais pas toujours, parfois ce peut être l’actionnaire par exemple dans le cadre d’une société holding) et non celle au jour le jour. De même, c’est bien le fond et non la forme qui doit prévaloir quant au processus décisionnel (la personne qui prend concrètement les décisions fondamentales). A noter que ce lieu n’est pas forcément celui des réunions du conseil d’administration. Enfin, il convient de faire une distinction entre la personne qui peut influencer les décisions d’une société (adviser) et celle qui prend la décision finale.

Les sociétés offshores ne sont pas concernées par l’impôt sur les successions dans la mesure où il ne s’applique qu’aux personnes physiques et aux trusts. En revanche, des conséquences fiscales peuvent avoir lieu pour les individus derrières ces sociétés.

On discutera ici principalement des sociétés holding détenant des actifs directement pour des personnes physiques ou pour des trusts (underlying companies). Bien entendu, au-delà des aspects fiscaux liés purement au droit anglais, il convient de prendre en compte la situation fiscale dans le pays du siège de la société.

En pratique, il est commun de détenir un immeuble au Royaume-Uni via une société offshore. Toutefois, depuis le 6 avril 2015, ces sociétés peuvent être soumises à l’impôt sur les plus-values en capital (NRCGT). Par ailleurs, depuis 2013, elles sont soumises à une charge annuelle (ATED) ainsi qu’une charge sur les gains en capitaux et depuis 2017, il n’y a plus d’avantages au niveau de l’impôt sur les successions (IHT).

VII) LA DÉTENTION D’UNE SOCIÉTÉ HOLDING OFFSHORE DIRECTEMENT PAR UNE PERSONNE PHYSIQUE

A) Impôt sur les successions

L’élimination de l’impôt sur les successions est généralement atteinte par le biais de la constitution d’une société offshore. En effet, ce ne sont pas les biens au Royaume-Uni qui sont soumis à l’impôt sur les successions mais les actions de la société elle-même qui constituent des biens étrangers, non soumis à taxation s’agissant des personnes physiques résidentes et non-résidentes (seules les personnes domiciled ou deemed domiciled au Royaume-Uni sont taxées au niveau successoral sur les biens situés à l’étranger).

Toutefois, depuis avril 2017, les sociétés offshores de même que les trusts seront soumis à l’impôt sur les successions s’agissant des propriétés immobilières résidentielles situées au Royaume-Uni. L’utilisation de telles structures est ainsi vaine de ce point de vue.

De même, une fois que la personne physique devient domiciliée au Royaume-Uni (ou deemed domiciled, 15 ans de résidence dès 2017), l’impôt sur les successions s’applique malgré l’interposition d’une société offshore (imposition sur les biens mondiaux). De ce point de vue-là, le recours à un excluded property trust est plus intéressant. L’utilisation d’une société offshore sur le long terme n’est donc valable que pour les personnes non-résidentes et non-domiciliées qui détiennent des biens britanniques (sauf pour les immeubles).

B) Impôt sur le bénéfice

Sous réserve de l’imposition selon le principe de la remise, les dividendes reçus de la société offshore sont taxés (7.5%, 32.5% ou 38.1%) si la personne est résidente ou domiciliée au Royaume-Uni.

En cas de taxation selon la remise, les dividendes sont imposés lors du rapatriement au Royaume-Uni aux taux plus élevés de 20%, 40% et 45% (en fonction des autres revenus du contribuable). Si l’individu entend quitter le Royaume-Uni sous peu, il vaut peut-être la peine de thésauriser le bénéfice de la société et de verser le dividende ultérieurement (attention toutefois à la non-résidence temporaire). En effet, si la personne est imposée selon le principe de la remise, seuls les dividendes rapatriés dans le pays seront taxés entre les mains du contribuable. Il convient néanmoins de prendre garde aux cas où la société offshore constituerait une relevant person. En effet, le paiement par la société de factures anglaises appartenant au Res Non Dom ou des versements à un actionnaire proche (par exemple le conjoint) résidant au Royaume-Uni peuvent être considérés comme des remises en faveur du RND.

Dans certaines circonstances, la société offshore peut être taxée sur ces bénéfices en transparence directement dans les mains de la personne physique résidente (peu importe qu’il y ait distribution ou non de dividendes), notamment lorsqu’il n’existe pas de justification autre que fiscale pour l’utilisation de la structure (transfer of assets abroad rules, section 720 ITA 2007). C’est notamment le cas lorsque l’actionnaire continue de jouir du bien mis dans la société. Les règles sur la remittance taxation s’appliquent aux Res Non Dom taxés selon la remise (revenus étrangers non rapatriés). Les motive defences s’appliquent également ici. A noter que la réforme d’avril 2017 n’a pas d’impact sur ce régime (protected trust).

Bien entendu, le salaire perçu (en espèces, en nature ainsi que tout autre avantage) par la personne physique dans le cadre de l’activité déployée au Royaume-Uni dans la société constitue du revenu de source anglaise. Attention également dans cette hypothèse à ne pas déplacer le siège de la société au Royaume-Uni. Cela concerne tant les directeurs apparents que ceux occultes (shadow director, soit lorsque le contribuable peut donner directement ou indirectement des instructions sur la gestion de la société au jour le jour). Cela peut être notamment problématique dans l’hypothèse où le contribuable met dans la société une résidence qu’il utilise et est en même temps considéré comme un directeur occulte. En effet, le bénéficie qu’il tire de l’utilisation de la maison est taxable comme du revenu entre ses mains (ITEPA 2003, benefit in kind regime).

C) Impôt sur les gains en capitaux

Les gains en capitaux surviennent lors de la réalisation des biens de la société ou en cas de liquidation de celle-ci. En théorie, ils ne sont pas taxables au Royaume-Uni (y compris s’agissant des biens locaux) dans la mesure où la société n’est pas résidente dans ce pays, sauf pour les immeubles et les établissements stables.

En réalité, mais sous réserve des CDI, les gains en capitaux sont taxables proportionnellement et directement (pas les gains en capitaux locaux qui restent imposables auprès de la société) auprès des actionnaires selon leurs parts (éventuellement celles des créanciers), qu’ils soient domiciliés ou résidents (ce régime est applicable aux résidents depuis le 6 avril 2008) au Royaume-Uni (sous réserve de l’imposition selon la remise sur la réalisation de biens offshores) (section 13 charge TCGA 1992) si :

– La société est une closed company (la société est détenue par au plus 5 actionnaires ou créanciers ou en cas de nombre plus élevé, chaque actionnaire est directeur (la notion de directeur est large et comprend également les directeurs de fait, shadow directors, ainsi que les personnes dirigeantes qui contrôlent au moins 20% du capital-actions)) ; ET

– Si les participants possèdent plus de 25% du capital-actions.

Les pertes de la société peuvent toutefois être compensées à condition que gains et pertes interviennent la même année sauf pour les Res Non Dom qui ne rapatrient pas le gain. Les pertes du contribuable peuvent aussi être déduites.

Une double imposition peut néanmoins se produire dans l’hypothèse où l’actionnaire est taxé une première fois sur le gain en capital puis une seconde fois lors du versement du dividende ou lors de la liquidation. Des exonérations sont alors possibles dans des cas particuliers.

A noter que depuis le 6 avril 2012 (exceptions à la section 13 charge), ce régime d’imposition en transparence ne s’applique pas si :

– Les gains en capitaux proviennent d’une activité économique (activité commerciale réelle) entièrement ou principalement déployée à l’étranger ; OU

– Il peut être démontré que le but de la structure mise en place n’est pas d’éviter (but principal) l’imposition sur les gains en capitaux ou sur le bénéfice (cela ne concerne pas l’impôt sur les successions ce qui permet parfois d’éviter la section 13 charge).

VIII) LA DÉTENTION D’UNE SOCIÉTÉ HOLDING OFFSHORE PAR UN TRUST (UNDERLYING COMPANY)

A) Impôt sur les successions

L’utilisation d’un Excluded Property Trust qui détient les actions de la holding (elle-même détenant des biens britanniques ou étrangers) est judicieuse puisqu’elle permet d’éviter que les actions de la société soient soumises à l’impôt sur les successions lorsque le settlor devient deemed domiciled dans ce pays (peu importe que le trust soit un RPT ou un QIIP et la résidence des bénéficiaires est irrelevante). Depuis 2017, cela ne fonctionne plus pour les propriétés immobilières résidentielles situées au Royaume-Uni. L’avantage d’utiliser cette structure est que l’on peut détenir des biens locaux ce qui n’est pas possible en cas d’utilisation uniquement d’un Excluded Property Trust.

B) Impôt sur le bénéfice

Dans l’hypothèse d’un settlor-interested trust, le settlor sera imposé directement sur les bénéfices de la société via les transferor rules. Dans le cas contraire, les revenus sont taxés lors des distributions du trust aux bénéficiaires (voir ci-dessus).

A noter que depuis avril 2017, selon les nouvelles règles, les transferor rules ne s’appliqueront pas s’agissant des revenus offshores de la société (sauf pour les revenus de source anglaise), même si celle-ci ne fait pas remonter chaque année au trust ses bénéfices et ce peu importe que le settlor soit non-domicilié ou deemed domiciled au Royaume-Uni. Les bénéfices seront ainsi taxés lors des distributions du trust aux bénéficiaires selon les matching rules, à conditions toutefois que le trust ne soit pas « tainted ».

A noter qu’une double taxation peut se produire notamment si le settlor est imposé une première fois sur le revenu de la société puis une deuxième fois lors de la liquidation de celle-ci (gain en capital). Malheureusement aucun crédit d’impôt n’est accordé dans cette hypothèse. La situation est différente si la société verse un dividende (pas de double imposition en principe).

C) Impôt sur les gains en capitaux

Sous réserve des exceptions à la section 13 charge, les gains en capitaux de la société sont reportés sur le trust (apportioned, section 13 TCGA). Toutefois, en règle générale le trust est également offshore et donc l’imposition intervient selon les règles applicables aux trusts (entre les mains du settlor ou lors des distributions aux bénéficiaires via les transfer of assets rules ou le régime sur les protected trusts). Une double imposition peut se produire si un gain en capital a été taxé entre les mains du settlor à la date de la réalisation du bien puis à nouveau lors de la liquidation de la société ou lors du paiement du dividende (cette double imposition peut être évitée si la liquidation ou la distribution au trust intervient dans les 3 à 4 ans selon les cas dès la réalisation du gain. En cas de vente la société en revanche, la double imposition est pleinement applicable).

Conclusion : Il faut considérer très attentivement l’opération envisagée. En effet, le rapatriement des fonds dans le trust peut s’opérer de deux manières, soit par le versement d’un dividende (revenu), soit lors de la liquidation de la société (gain en capital). Or, ce choix implique des conséquences fiscales différentes. La principale différence, outre le taux, réside dans le fait que la taxation varie selon que le settlor est uniquement résident ou est également domicilié au Royaume-Uni. En tous les cas, les risques de double imposition sont grands. L’utilisation de prêts peut parfois être une solution.

Pour plus d’informations, veuillez nous contacter.

Les avocats seront-ils eux aussi bientôt soumis à la LBA ?

Le 1er juin dernier, le Conseil fédéral a ouvert une nouvelle procédure de consultation visant à modifier une énième fois la Loi fédérale sur le blanchiment d’argent (LBA). Dernière cible des autorités, « les conseillers », soit les avocats, les notaires, les fiduciaires, ou encore les comptables fournissant certaines prestations en lien notamment avec la création, la gestion ou l’administration de sociétés et de trusts. Selon l’avant-projet, ces personnes seraient dorénavant également soumises à la LBA au même titre que les intermédiaires financiers et les négociants et devraient impérativement respecter des obligations de diligence inscrites dans la LBA.

Concrètement, sont visées les activités préparatoires et effectives fournies à titre professionnel suivantes :

– La création, l’administration et la gestion de personnes morales et de constructions juridiques ;

– L’organisation des apports en lien avec ces activités ;

– L’achat et la vente de sociétés ;

– La mise à disposition d’une adresse ou de locaux destinés à abriter le siège des structures visées ;

– L’exercice de la fonction d’actionnaire à titre fiduciaire pour ces entités (« nominee shareholder ») ou l’assistance à exercer cette fonction.

Pour rappel, à l’heure actuelle, ces activités sont soumises à la LBA uniquement lorsque des valeurs patrimoniales appartenant à des tiers sont acceptées ou gardées en dépôt ou si une aide est fournie pour les placer ou les transférer. Il en va de même en cas d’activité d’organe d’une société de domicile. En revanche, le simple conseil ne générant pas de flux financiers n’est pas soumis à la LBA. L’avant-projet, reprenant les recommandations du GAFI sur ce point instaure ainsi une véritable nouveauté en droit suisse, notamment pour les avocats qui ne connaissent jusqu’à aujourd’hui qu’une distinction entre activité traditionnelle (conseil, représentation en justice, etc.) et non-traditionnelle (trustee, gestionnaire de patrimoine, etc.).

L’établissement d’un concept de structure tombera également dans le champ d’application de la LBA.

Les avocats auront peut-être des obligations de diligence en matière de LBA.

Sont ainsi concernés les trusts ainsi que toutes les sociétés offshores (opérationnelles ou non) et les sociétés de domicile suisses (pour rappel à la différence des société commerciales ces dernières ont généralement pour unique but la détention et l’administration de valeurs patrimoniales). Les sociétés opérationnelles suisses seront exclues, le Conseil fédéral ayant estimé que seules les sociétés étrangères présentaient des risques du fait de l’existence de garde-fous dans l’établissement d’une personne morale en Suisse (compte consignation, constitution devant un notaire, rapport de fondation, etc.).

Les obligations de diligence prévues pour « les conseillers » seront globalement les mêmes que celles incombant actuellement aux négociants. Elles incluront les obligations de vérifier l’identité du cocontractant, d’identifier l’ayant droit économique, d’établir et de conserver des documents ainsi que de clarifier l’arrière-plan et le but de la prestation à fournir. Les avocats devront ainsi prendre des mesures organisationnelles appropriées.

En revanche, en cas de soupçons de blanchiment d’argent ou de financement du terrorisme ou si les avocats ne seront pas en mesure de remplir leurs obligations de diligence, ils devront uniquement refuser la relation d’affaires ou y mettre fin. En particulier, les avocats n’auront pas d’obligation d’informer le Bureau de communication en matière de blanchiment d’argent (MROS). Cette exonération s’explique par le fait que les activités en question ne génèrent pas de flux financiers (l’un des objectifs de l’obligation de communiquer est justement de poursuivre et de confisquer les valeurs patrimoniales d’origine criminelle) et qu’il convient de ne pas ébranler la relation de confiance entre les avocats et leurs clients (le secret professionnel).

L’efficacité du système sera selon le Conseil fédéral assurée par le contrôle d’une entreprise de révision (l’idée de soumettre les conseillers à un organisme d’auto-régulation comme c’est le cas pour les intermédiaires financiers n’a pas été retenue). Celle-ci devra dénoncer au Département fédéral des finances (DFF) les avocats qu’il soupçonne d’avoir enfreint les obligations de diligence qui leur incombent. Le conseiller encourra alors une amende de CHF 500’000 au plus en cas de comportement intentionnel et de CHF 150’000 s’il agit par négligence.

A noter encore que le Conseil fédéral a renoncé à instaurer des obligations de diligences pour les prestations de conseil concernant l’achat ou la vente de biens immobiliers, jugeant le système actuel satisfaisant (intervention des banques, du notaire, etc.).

Au-delà des problèmes posés par le risque d’une perte confiance entre les avocats et leurs clients et des questions d’éthique (est-ce finalement plus moral qu’un avocat élabore une stratégie de défense pour son client inculpé de blanchiment d’argent afin de lui éviter la prison et de lui permettre de continuer ses agissements en tout impunité ?), ce nouveau projet soulève des difficultés d’ordre pratique.

En effet, dans la mesure où l’avocat intervient au début du processus de constitution de l’entité ou du trust, voire même au stade de la simple réflexion, comment pourra-t-il raisonnablement déterminer par avance si la structure mise en place servira in fine comme instrument de blanchiment d’argent ou de financement du terrorisme ? On voit déjà la phrase assassine du procureur qui 10 ans plus tard viendra dire à l’avocat, « vous auriez dû savoir que votre client avait des intentions peu recommandables avec sa nouvelle société ! ».

A ne pas en douter, le risque d’une sanction pénale va refroidir plus d’un avocat à fournir des conseils juridiques dans ce domaine, mais c’est sans doute clairement là l’objectif du GAFI. En tous les cas, les conseillers qui se risqueront dans ce business chercheront par tous les moyens d’obtenir des garanties de la part de leurs clients en leur demandant de signer des certifications et des disclaimers.

La procédure de consultation prendra fin le 21 septembre prochain mais on peut déjà parier sur des débats animés au Parlement.

Les trusts feront-ils bientôt partie du paysage suisse ?

Trusts suisses: quels sont les enjeux?

Les trusts vont-ils être intégrés en droit interne suisse ?

Fin avril, la Commission des affaires juridiques du Conseil des Etats, suivant son homologue du Conseil national, a décidé de déposer une motion de commission pour charger le gouvernement de préparer un projet visant à introduire les trusts en droit interne suisse.

Pour rappel, un trust est un rapport juridique prenant naissance lorsque, sur la base d’un document de constitution (le trust deed), le constituant (le settlor) transfère des valeurs patrimoniales déterminées à une ou plusieurs personnes (les trustees), lesquelles ont l’obligation de les gérer et de les utiliser dans un but établi à l’avance par le settlor en faveur d’un ou de plusieurs tiers (les beneficiaries).

Contrairement à l’enthousiasme affiché par certains qui y voient un moyen de renforcer l’attractivité de la place financière suisse, nous exprimons ici notre réserve.

Tout d’abord, la Suisse n’est pas un pays de common law et n’en sera jamais un. Bien que nous connaissions le concept de fiducie en droit suisse, cette dernière n’est absolument pas comparable au trust, ne serait-ce que parce qu’un trust n’est pas un rapport contractuel !

Aussi, notre Code civil ignore la distinction entre legal et equitable ownership. Il conviendrait dès lors de réformer en premier lieu nos droits réels avant d’intégrer le concept du trust en droit interne. Toutes les juridictions civilistes qui se sont prêtées à ce jeu n’ont jamais véritablement réussi à imposer ce type de structure. L’inverse est également vrai, la fondation, institution de droit civil, n’a jamais eu voix au chapitre dans les pays anglo-saxons.

En revanche, les trust companies n’ont pas attendu l’élaboration d’un droit des trusts en Suisse pour s’installer dans notre pays. En effet, s’il y a autant de trustees chez nous, cela s’explique par trois motifs bien particuliers :

  • Tout d’abord, jusqu’à ce jour, la réglementation de cette activité est quasi-inexistante comparée à des juridictions comme Singapour ou les îles Caïmans, où une licence peut coûter jusqu’à USD 100’000 annuellement. En Suisse, nul besoin d’autorisation ni de qualifications particulières pour être trustee, ni même de garanties financières (assurance, fonds propres, etc.). Les trust companies sont uniquement soumises aux règles sur la lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme. Cette situation devrait toutefois changer radicalement avec l’entrée en vigueur de la nouvelle LSFin/LEFin ;
  • Ensuite, contrairement à des pays comme le Royaume-Uni, les trustees ne sont pas imposés sur les revenus et les biens du trust, ce qui simplifie considérablement les choses ;
  • Enfin, la Suisse est une place financière reconnue mondialement où les clients peuvent déposer et gérer les avoirs de leur trust (banques, gestionnaires de fortune, etc.) en toute sérénité.

Ainsi, il ressort de ce qui précède qu’il est tout-à-fait loisible d’avoir un trustee basé en Suisse mais que le trust lui-même soit soumis à un droit étranger. Ce n’est pas l’adoption d’un droit local sur les trusts qui va attirer un nombre plus important de ces structures chez nous.

Aussi, la Suisse va-t-elle offrir au settlor la flexibilité que permet le droit des Bahamas, des îles Caïmans ou des îles Cook notamment en matière de protection contre les créanciers ou du point de vue successorale ? Car il ne faut pas s’y tromper, si le trust était à l’époque l’instrument de planification fiscale par excellence, aujourd’hui c’est bel et bien un outil successoral et de protection contre les créanciers dans le cadre d’activités risquées (y compris le mariage). Or, avec les mécanismes rigides et profondément ancrés dans notre tradition juridique des réserves héréditaires, de la liquidation des régimes matrimoniaux et de la révocation dans la faillite, on peut douter que le législateur suisse accepte de créer une brèche béante en matière de trusts juste pour renforcer l’attractivité notre place financière. On peut dès lors légitimement se demander à quoi va servir une telle règlementation.

Quant à l’argument d’offrir une juridiction réputée au client, il ne tient pas puisque le Royaume-Uni, Singapour, la Nouvelle-Zélande ou encore les Etats-Unis connaissent ce type d’institution.

Par ailleurs, au niveau de la fiscalité, s’il existe certes une circulaire de la Conférence suisse des impôts (CSI) traitant de l’imposition des trusts en Suisse, force est bien d’admettre que l’administration fiscale tant fédérale que cantonale n’accorde que très peu de considération pour cette institution puisque sauf exception, le trust est toujours considéré comme transparent et imposé en conséquence entre les mains du settlor ou des bénéficiaires.

Enfin, on relèvera qu’il faudra de très nombreuses années pour que les tribunaux développent une jurisprudence étoffée et fiable en la matière.

Pour finir, il faudra alors réformer le droit suisse des fondations puisqu’à l’heure actuelle, outre les fondations à but d’utilité publique, les fondations de famille ne peuvent servir qu’au paiement de frais d’éducation, d’établissement et d’assistance à des membres de la famille. Admettre en droit interne uniquement les trusts charitables n’apporteraient aucune nouveauté remarquable dans la mesure où le régime actuel des fondations caritatives permets de remplir ce rôle à pleine satisfaction.

Pour toutes ces raisons, nous pensons qu’à moins de révolutionner le droit des trusts, l’intégration de cette institution dans notre ordre juridique risque de créer plus de confusion et d’insécurité qu’autre chose. Une reconnaissance des trusts étrangers, comme c’est le cas à l’heure actuelle par la Suisse avec la ratification de la Convention de la Haye depuis 2007, nous paraît suffisante.

L’impact de la 5ème directive européenne contre le blanchiment d’argent sur les trusts, les comptes bancaires et les biens immobiliers

Introduction

Alors que la 4ème directive européenne de lutte contre le blanchiment d’argent vient tout juste d’être transposée par les États membres, le Parlement européen a déjà voté une nouvelle mouture le 19 avril dernier (modification de la directive (UE) 2015/849).

Suite aux attaques terroristes de Paris et de Bruxelles ainsi qu’aux scandales des Panama et des Paradise Papers, l’Union européenne a décidé de mettre à jour sa législation anti blanchiment d’argent afin d’accroître la transparence, notamment fiscale, et de réagir aux derniers développements technologiques (crypto monnaie, etc.). Et tant pis pour le respect de la vie privée et au droit à la protection des données. De toute façon, tout ce qui n’est pas transparent est forcément perçu comme criminel aujourd’hui.

CROCE & Associés SA vous résume brièvement les principaux changements à venir :

1) Extension du champ d’application personnel de la directive

Seront désormais assujettis à la directive, outre les auditeurs, les experts-comptables externes et les conseillers fiscaux, toute personne qui fournit une aide matérielle, une assistance ou des conseils en matière fiscale comme activité économique ou professionnelle principale.

Seront également soumis les agents immobiliers, y compris lorsqu’ils agissent en qualité d’intermédiaires pour la location de biens immobiliers, mais uniquement en ce qui concerne les transactions pour lesquelles le loyer mensuel est d’un montant égal ou supérieur à EUR 10’000.

Enfin, la directive s’appliquera aux prestataires de services d’échange entre monnaies virtuelles et monnaies légales ainsi qu’aux entreposeurs, négociants et intermédiaires actifs dans le commerce de l’art (galeries d’art, maison de vente aux enchères, ports francs, etc.).

2) Registre central des sociétés et des trusts

Outre les organismes officiels habituels (les autorités chargées de la lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme, les autorités fiscales, les autorités de surveillance des entités assujetties, les autorités pénales, etc.), les particuliers auront un accès public au registre des ayants-droit économiques des sociétés opérant dans l’Union européenne.

S’agissant des fiducies/trusts ou des constructions similaires, le registre sera accessible à condition de justifier un intérêt légitime. Chaque État membre définira dans son droit interne ce qu’il entend par cette notion, étant précisé que le droit applicable sera celui du pays dans lequel est établi ou réside le fiduciaire/trustee. La directive précise d’ores et déjà qu’elle entend accorder la qualité de « personnes disposant d’un intérêt légitime » aux journalistes d’investigations et aux ONG (par exemple Public Eye, etc).

En effet, selon le texte adopté :

« L’accès du public aux informations sur les bénéficiaires effectifs permet un contrôle accru des informations par la société civile, notamment la presse ou les organisations de la société civile, et contribue à préserver la confiance dans l’intégrité des transactions commerciales et du système financier.

Il peut contribuer à lutter contre le recours abusif à des sociétés et autres entités juridiques et constructions juridiques aux fins du blanchiment de capitaux ou du financement du terrorisme, à la fois en facilitant les enquêtes et par le biais de considérations de réputation, dans la mesure où quiconque susceptible de conclure des transactions connaît l’identité des bénéficiaires effectifs.

Il facilite également la mise à disposition efficace et en temps utile d’informations pour les institutions financières et les autorités, notamment les autorités des pays tiers, impliquées dans la lutte contre ces infractions. L’accès à ces informations serait également utile aux enquêtes sur le blanchiment de capitaux, sur les infractions sous-jacentes associées et sur le financement du terrorisme. »

Au niveau du registre, devront être identifiés, les constituants (settlors), les trustees/fiduciaires, les protectors, les bénéficiaires (ou la catégorie de bénéficiaires) ainsi que toute autre personne physique exerçant un contrôle en dernier ressort sur la structure.

Le public, respectivement les personnes ayant un intérêt légitime devront au moins avoir accès au nom, au mois et à l’année de naissance, au pays de résidence et à la nationalité du bénéficiaire effectif, ainsi qu’à la nature et à l’étendue des intérêts effectifs détenus par le bénéficiaire. Les États membres pourront prévoir un accès plus large dans leur législation interne.

Il est précisé que quand bien même le fiduciaire/trustee ne serait pas établi ou ne résiderait pas dans un État membre, l’inscription au registre central sera obligatoire auprès de l’État membre dans lequel le fiduciaire/trustee aura noué une relation d’affaires ou acquis un bien immobilier au nom de la fiducie/du trust ou de la construction juridique similaire.

Les données sur les bénéficiaires effectifs seront accessibles pendant 5 ans après la liquidation de la structure/société.

Enfin, les informations seront partagées et interconnectées entre les États membres grâce à la plate-forme centrale européenne instituée par la directive (UE) 2017/1132.

Afin de mitiger les risques de fraude, de chantage et d’extorsion de la part de tiers malintentionnés, la directive prévoit d’exiger une inscription en ligne afin de pouvoir connaître l’identité de la personne demandant des informations consignées dans les registres ainsi que le paiement d’une redevance.

L'UE adopte sa nouvelle directive en matière de blanchiment d'argent.

3) Registre central des comptes bancaires et des biens immobiliers

La directive prévoit également la mise en place de registres centraux de recherche de données, permettant l’identification, en temps utile, de toute personne physique ou morale détenant ou contrôlant des comptes de paiements et des comptes bancaires identifiés par un numéro IBAN ainsi que des coffres forts tenus par un établissement de crédit établi sur leur territoire.

De même, un registre central permettra l’identification de toute personne physique ou morale détenant des biens immobiliers sur le territoire de l’Union.

4) Autres modifications législatives en matière de blanchiment d’argent

Parmi les autres modifications législatives, on peut citer :

–        Le seuil fixé pour identifier les détenteurs de cartes prépayées anonymes a été revu à la baisse, passant de 250€ à 150€.

–        Les nouvelles règles imposeront aux plateformes de change de monnaies virtuelles (telles que le bitcoin) et aux fournisseurs de portefeuilles de stockage de vérifier l’identité de leurs clients.

–        Des critères plus sévères pour évaluer si les pays hors Union Européenne présentent un risque accru de blanchiment d’argent et un examen plus approfondi des transactions impliquant des ressortissants de pays à risque (y compris la possibilité de sanctions).

–        La protection des « dénonciateurs » signalant un blanchiment d’argent (y compris le droit à l’anonymat).

5) Prochaines étapes

La texte va maintenant être soumis pour approbation au Conseil de l’Union européenne. La directive révisée entrera ensuite en vigueur 3 jours après sa publication dans le Journal officiel (JO). Les Etats membres auront enfin 18 mois pour introduire la nouvelle législation dans leur droit interne respectif. Très concrètement, cela signifie que le délai de transposition sera vraisemblablement échu fin 2019 et partant que le registre des sociétés devra être opérationnel à cette date, celui des trusts début 2020 (dans les 20 mois dès l’entrée en vigueur de la directive modificative), celui des comptes bancaires et des coffres-forts mi-2020 (dans les 26 mois) et enfin l’interconnexion des divers registres (trusts et sociétés) entre les Etats membres devra être effective début 2021 (dans les 32 mois).

Seule question qui reste en suspens est de savoir quelle sera la position du Royaume-Uni dans ce dossier puisque le Brexit est censé intervenir en mars 2019 mais que l’Union européenne exige, en contrepartie du maintien du marché unique, la reprise du droit européen par ce pays pendant la période transitoire qui s’achèvera probablement vers le milieu de 2021.

Conclusion

Le mise en place de registres publics contenant des informations financières sur des individus ou accessibles à des tiers justifiant d’un hypothétique intérêt légitime est une grave restriction aux droits fondamentaux de l’être humain et notamment à son droit au respect de la vie privée. De plus, dans un monde où le sensationnel est roi et où l’on n’hésite pas à divulguer des fake news pour se distinguer ou atteindre ses buts, force est de relever qu’il sera impossible de vérifier la conformité de l’usage des informations ainsi collectées, notamment auprès des journalistes ou des ONG.

Au nom de la lutte contre le terrorisme c’est toute la vie intime des individus qui sera exposée au grand public. Or, personne ne semble se s’inquiéter de cette dérive, sans doute parce que l’Union européenne se garde bien de communiquer sur le sujet mais aussi parce que peu se sentent en l’état réellement concernés. Tel sera sans doute un peu moins le cas lorsque les autorités ou les particuliers (employeurs, etc.) sauront que Monsieur X consulte un psychiatre (par le paiement de ses factures), offre des cadeaux à ses maitresses (par des virements) ou encore se voit refuser un prêt parce qu’il est à découvert sur ses autres comptes.

Aussi, ces mesures empêchent-elles vraiment les terroristes de frapper leurs cibles ? Quand on voit par exemple comment la France gère son système des fiches « S », on peut légitimement douter de l’efficacité de ces nouvelles normes. En revanche, le fisc lui s’en frotte les mains…

Fort heureusement, la Suisse, qui n’est pas membre de l’Union européenne, n’est pas touchée par cette démesure et une pesée des intérêts est toujours faite entre le respect de la sphère privée et l’intérêt public de l’État à surveiller chacun d’entre nous.

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La taxation des « res non dom » au Royaume-Uni

Lire en version livre

Par Lorenzo CROCE, avocat aux barreaux de Genève et de Singapour, LL.M., TEP

I) Introduction

Ils sont russes, indiens, arabes ou français et résident au Royaume-Uni, principalement à Londres, depuis longtemps. Pourquoi ? Certainement pas pour le climat mais plutôt pour le régime fiscal ultra-favorable dont ils bénéficient.

Malgré le Brexit et les changements législatifs qui sont intervenus en 2017, le statut fiscal de « résident non-domicilié » (Res Non Dom) reste très populaire chez les plus riches et présente une alternative intéressante à la résidence en Suisse ou dans d’autres juridictions favorables comme Monaco ou le Portugal.

Relativement facile à obtenir, il permet au contribuable de ne pas payer d’impôts sur ses revenus étrangers tant que ceux-ci ne sont pas rapatriés dans le pays. Le résident ne sera alors imposé que sur ses revenus et gains en capitaux de source anglaise.

Les autorités fiscales britanniques (Her Majesty’s Revenue and Customs, HMRC) ne demandent en principe pas non plus la liste des biens étrangers ainsi que les sociétés détenues offshore, seuls les fonds générés ou importés localement les intéressent (sous réserve de l’échange automatique d’informations à des fins fiscales, CRS).

Il est donc possible de déménager au Royaume-Uni sans payer d’impôts et de rouler avec de magnifiques voitures de luxe.

Il convient toutefois de préparer très minutieusement son départ et de planifier à l’avance sa situation patrimoniale afin d’éviter des surprises désagréables une fois sur place.

La présente contribution a pour objectif de présenter dans le détail les conditions nécessaires – qui sont devenues très strictes ces dernières années – afin de pouvoir bénéficier de ce statut ainsi que certaines règles d’or à respecter absolument sous peine d’être taxé très lourdement (le taux d’imposition au Royaume-Uni peut rapidement atteindre les 45%).

II) La notion de domicile au Royaume-Uni

Distinguer le concept de « domicile » et de « résidence » et en appréhender les effets est important d’un point de vue fiscal. En effet, être domicilié au Royaume-Uni (c’est-à-dire dans l’une des trois juridictions suivantes : Angleterre et Pays de Galles, Ecosse ou Irlande du Nord), engendre d’importantes conséquences sur la taxation des revenus et des gains en capitaux ainsi que s’agissant de la succession d’un individu.

Le domicile, défini par la jurisprudence (case law), correspond au pays dans lequel la personne possède sa maison permanente ou un lien étroit avec celui-ci. Il se distingue de la nationalité et de la résidence (il est d’ailleurs possible d’avoir plusieurs résidences).

Au Royaume-Uni, chaque individu possède un domicile qu’il acquiert généralement à la naissance. Il ne s’agit toutefois pas nécessairement du pays où il est né ou celui dans lequel la personne habite aujourd’hui (on peut être domicilié dans un pays et résident dans un autre). Il n’est possible d’avoir qu’un seul domicile à la fois.

Généralement on distingue trois types de domicile (un seul de ces domiciles peut s’appliquer à la fois) ainsi qu’un domicile spécifique (deemed UK domicile) qui s’applique à l’impôt sur les successions (inheritance tax, IHT) et depuis avril 2017 à tous les autres impôts. A noter qu’il est possible d’être deemed domiciled au Royaume-Uni mais également domicilié (au sens général) dans un autre Etat en même temps. Il convient dans ce cas de prêter une attention particulière aux conventions de lutte contre la double imposition afin d’éviter d’être imposé deux fois.

A) Le domicile d’origine (domicile of origin)

Généralement une personne prend, à sa naissance, le domicile de son père soit le lieu de sa résidence permanente. Le lieu de naissance est irrelevant.

Si les parents ne sont pas mariés au moment de la naissance, l’enfant acquiert le domicile de sa mère. En cas d’adoption, celui du père adoptif et en l’absence de celui-ci, le domicile de la mère adoptive.

Il est très difficile de changer ou de perdre son domicile d’origine. Il demeure jusqu’à ce que la personne prenne un nouveau domicile de dépendance ou de choix (voir ci-dessous sous B) et C)). Le domicile d’origine revit lorsque les autres domiciles sont abandonnés ou perdus et jusqu’à ce que la personne acquière un nouveau domicile.

B) Le domicile de dépendance (domicile of dependency)

Jusqu’à l’âge de 16 ans, les enfants possèdent le domicile du parent qui en assure la garde. En cas de changement de domicile du parent, celui de l’enfant change automatiquement.

Si le mariage est intervenu avant le 1er janvier 1974, l’épouse prend automatiquement le domicile de son mari. Pour les mariages ultérieurs, les critères habituels du domicile s’appliquent à l’épouse également.

C) Le domicile volontaire (domicile of choice)

A partir de 16 ans (plus jeune en Ecosse), une personne a la possibilité de se constituer son propre domicile. Les conditions suivantes doivent être remplies et il appartient à la personne qui entend bénéficier de ce statut d’apporter la preuve qu’il :

–    réside sur le territoire du pays en question (la notion de résidence est différente de celle fiscale décrite ci-dessous sous III)) ;

–    a l’intention d’y demeurer de façon permanente ou pour une période indéfinie (intention d’y passer sa retraite ou le reste de sa vie).

Il ressort de ce qui précède que l’on peut résider dans un pays pendant de nombreuses années et ne pas y être domicilié faute d’intention d’y rester de manière permanente. De même, il ne suffit pas de quitter un pays avec l’intention de ne pas y retourner pour perdre son domicile, encore faut-il s’en constituer un nouveau selon les deux critères établis ci-dessus, sinon le domicile d’origine reste/revit.

En tous les cas, c’est à l’individu qui se prévaut d’un changement de domicile d’en apporter la preuve. Il convient de prouver un fait subjectif (intention de rester en permanence dans un pays) par des éléments objectifs (la simple déclaration de la personne ne suffit pas). Il n’existe pas de règles particulières édictées par les autorités fiscales (HMRC) sur ce point. Il appartient au contribuable de cocher la case appropriée dans sa déclaration fiscale et cas échéant une enquête pourra être ouverte par les autorités par la suite.

Il n’est toutefois pas nécessaire d’avoir rompu tous les liens avec son domicile précédent. Il n’est pas non plus obligatoire d’avoir acquis la nationalité du pays en question quand bien même cet élément sera pris en considération (y compris l’abandon de l’ancien passeport). Parmi les autres indices à prendre en compte on relèvera, outre les volontés communiquées à des tiers, le lieu du travail et de séjour de la famille (conjoint, enfants, etc.), l’achat d’une nouvelle maison et la vente de l’ancienne, l’ouverture de nouveaux comptes bancaires et le transfert de ses biens, l’apprentissage de la langue du pays, les adhésions dans des clubs ou des cercles d’influence, l’achat d’une place au cimetière ou encore le lieu de rédaction du testament de l’individu.

D) Le domicile réputé (deemed domicile)

S’agissant de l’impôt sur les successions (IHT), et depuis le 6 avril 2017, tous les impôts, il est possible pour une personne d’être considérée comme réputée domiciliée au Royaume-Uni et cela peu importe le lieu de son domicile au sens « général » décrit ci-dessus.

Jusqu’en 2017, pour les personnes qui arrivaient au Royaume-Uni (arrivers), elles étaient considérées comme réputées domiciliées si elles résidaient d’un point de vue fiscal (voir ci-dessous pour la notion) pendant 17 ans au cours des 20 années fiscales précédentes. Le domicile commençait généralement ainsi au début de la 17ème année fiscale (ainsi si X arrivait au Royaume-Uni le 1er février 2001, année fiscale 2001/2002, il était considéré comme réputé domicilié à partir du 6 avril 2016, soit pour l’année fiscale 2016/2017). Dès avril 2017, cette période a été fixée à 15 années au lieu de 17 (deemed domiciled dès la 16ème année) et concerne tous les impôts à savoir celui sur le revenu, les gains en capitaux ainsi que les successions. Les années passées alors que la personne est mineure sont comptabilisées. Idem s’agissant des personnes bénéficiant du statut de « split year » (voir ci-dessous).

A noter que le calcul est remis à zéro après six années fiscales complètes de non résidence au Royaume-Uni. S’agissant de l’impôt sur les successions, le contribuable reste en plus soumis à l’IHT en cas de décès dans un délai de trois années fiscales complètes malgré sa non résidence.

Pour les personnes domiciliées au Royaume-Uni selon les règles ordinaires qui quittent le pays (leavers), celles-ci restent réputées domiciliées du point de vue de l’IHT pendant les trois années civiles qui suivent l’acquisition d’un nouveau domicile étranger. Il s’agit d’éviter que des personnes quittent le Royaume-Uni avant leur décès pour échapper à l’impôt sur les successions.

A relever que les deux règles mentionnées ci-dessus (celles sur « arrivers » et les « leavers ») peuvent se recouper. Il convient donc d’effectuer tous les calculs pour éviter les mauvaises surprises. Certaines conventions de double imposition prévoient des dispositions spéciales (par exemple, l’Inde, la France, le Pakistan ou l’Italie où les règles sur le deemed domiciled ne s’appliquent pas). Les diplomates étrangers constituent également une exception.

A noter que depuis avril 2017, les personnes nées et ayant eu un domicile d’origine au Royaume-Uni (et ayant par la suite acquis un domicile de choix à l’étranger) sont immédiatement soumises aux impôts dès leur retour dans le pays. S’agissant de l’impôt sur le revenu et les gains en capitaux, elles sont taxées selon le régime ordinaire pour chaque année de résidence. En ce qui concerne l’IHT, une petite période de grâce est accordée aux personnes qui retournent au Royaume-Uni pour une courte période. Ainsi, la personne concernée sera soumise à l’IHT si elle a été résidente au Royaume-Uni pendant au moins une année fiscale au cours des deux années précédant l’année en question.

Les conséquences fiscales d’être réputé domicilié sont les suivantes :

–    Tout comme les personnes domiciliées selon les critères généraux, elles sont imposées sur les successions sur la base de leurs biens mondiaux, à la différence des personnes résidentes mais non-domiciliées qui sont imposées uniquement sur les biens se trouvant au Royaume-Uni.

–    Les personnes considérées comme deemed domiciled ne peuvent plus invoquer le régime de la remise. Elles sont taxées sur leurs revenus et leurs gains en capitaux mondiaux. Ainsi, depuis 2017 et le raccourcissement des délais, le régime des Res Non Dom n’est plus aussi intéressant pour les résidents de longue durée au Royaume-Uni.

On rappellera enfin qu’il appartient à chaque contribuable de déterminer s’il doit être considéré comme domicilié ou non au Royaume-Uni. Le cas échéant, il indiquera son statut en cochant la case appropriée dans sa déclaration fiscale. L’HMRC se réserve le droit de mener des enquêtes mais l’absence de réaction du fisc ne signifie en aucun cas une acception de la situation du contribuable.

III) La notion de résidence au Royaume-Uni

Depuis le 6 avril 2013, les autorités fiscales ont adopté un système clair, objectif et précis (mais compliqué) afin de déterminer si une personne est résidente au Royaume-Uni.

Le test, appelé « Statutory Residence Test » (SRT), se divise en 3 parties. Il appartient à chaque individu de déterminer s’il remplit ou non les conditions de résidence.

Les conventions de double imposition (CDI) sont toutefois réservées.

A) L’« automatic overseas test »

Si une personne remplit l’une ou l’autre des 5 conditions alternatives suivantes, elle est automatiquement considérée comme non-résidente au Royaume-Uni (il n’y a par ailleurs pas à examiner les 2 autres tests, l’automatic overseas test prime en toute hypothèse en cas de conflit) :

–    l’individu a été résident au Royaume-Uni pendant une année ou plus au cours des 3 dernières années fiscales mais a séjourné dans le pays moins de 16 jours (dans le calcul du nombre de jours c’est la présence de la personne à minuit qui compte en principe) pendant l’année fiscale en cours et n’est pas décédé durant cette période ;

–    la personne n’a pas été résidente au Royaume-Uni pendant les 3 dernières années fiscales et a séjourné dans le pays moins de 46 jours pendant l’année fiscale en cours ;

–    l’individu (conditions cumulatives) travaille (le temps à voyager est compté, l’élément déterminant pour distinguer entre travail au Royaume-Uni ou à l’étranger étant le moment de l’embarquement/débarquement au Royaume-Uni de l’avion, du train, etc.) à plein-temps (35 heures en moyenne par semaine) à l’étranger pendant l’année fiscale en cours sans interruption notable (tel est le cas si l’individu travaille moins de 3 heures par jour pendant 31 jours, sauf si l’absence résulte de la prise de vacances, de la maladie ou de la maternité/paternité), séjourne moins de 91 jours au Royaume-Uni et travaille moins de 31 jours dans ce pays (une journée de travail compte 3 heures au minimum) ;

–    la personne est décédée pendant l’année fiscale considérée, a séjourné moins de 46 jours sur le territoire national et n’était pas résident au Royaume-Uni pendant l’une ou l’autre des deux années fiscales précédentes.

–    l’individu est décédé pendant l’année fiscale considérée et aurait rempli les conditions du point 3 (work abroad test) jusqu’à la veille de son décès et n’était pas résident au Royaume-Uni les deux années fiscales précédentes en application du point 3.

Si aucune de ces conditions n’est remplie, il convient de passer au test suivant.

A noter que pour le work abroad test (3ème hypothèse), le contribuable qui entend se prévaloir de cette situation doit conserver une quantité importante de documents et doit notamment tenir un décompte des heures passées à l’étranger.

B) L’« automatic UK test »

Une personne est automatiquement considérée comme résidente au Royaume-Uni si elle remplit l’une ou l’autre des 4 conditions suivantes :

–    L’individu séjourne 183 jours ou plus au Royaume-Uni pendant l’année fiscale en cours ;

–    L’individu dispose d’un logement (« home », en tant que propriétaire ou locataire) au Royaume-Uni pendant 91 jours consécutifs au minimum (dont 30 jours au minimum pendant l’année fiscale considérée) et l’occupe durant 30 jours au minimum (consécutifs ou non consécutifs) durant l’année fiscale considérée. Par ailleurs, il faut que pendant ces 91 jours, l’individu ne possède pas de logement à l’étranger ou dans le cas contraire ne séjourne (il n’y a pas de nombre d’heures minimums, un seul instant suffit) pas plus de 30 jours dans chacun d’eux pendant l’année fiscale en cours.

–    L’individu travaille à plein-temps (35 heures par semaine en moyenne) au Royaume-Uni sur une période de 365 jours sans interruption notable (dont 1 jour au minimum durant l’année fiscale considérée) et 75% du total de nombre de jours de travail pendant l’année fiscale en cours sont considérés comme des jours durant lesquels l’individu travaille plus de 3 heures.

–    L’individu est décédé pendant l’année fiscale en cours, dispose d’un logement (home) au Royaume-Uni (en cas de logement à l’étranger également il faut que l’individu n’ait pas séjourné plus de 30 jours dans cet endroit ou chaque jour depuis le début de l’année fiscale jusqu’à sa mort) et était résident au Royaume-Uni pendant les trois années précédant sa mort. Il faut par ailleurs que l’individu ne se trouve pas dans le cas d’application d’une split year s’agissant de l’année précédant sa mort.

Si aucune des conditions n’est remplie il convient de passer au test suivant

C) Le « sufficient ties test »

Le « sufficient ties test » implique l’examen des liens que l’individu possède avec le Royaume-Uni. Il existe 5 types de liens à savoir les liens familiaux (family tie : la personne est mariée/partenaire enregistrée avec un résident au Royaume-Uni et vit avec ou a un enfant mineur également résident à condition que le parent voit l’enfant dans ce pays pendant 60 jours au minimum durant l’année fiscale), les liens liés au logement (accomodation tie : l’individu dispose d’un logement au Royaume-Uni pendant une période continue de 91 jours au minimum durant l’année fiscale et passe au minimum une nuit durant cette année), ceux liés au travail (work tie : le résident travaille (salarié ou indépendant) au minimum 40 jours par année au Royaume-Uni), ceux liés au pays (country tie : une personne a passé plus de jours au Royaume-Uni durant l’année fiscale que dans n’importe quel autre pays ; A noter que ce test ne s’applique qu’aux personnes en partance, voir ci-dessous) et enfin la règles des 90 jours (90 days tie : la personne passe 90 jours au minimum au Royaume-Uni durant l’une ou l’autre des 2 années fiscales précédentes).

Une personne est ainsi considérée comme résidente au Royaume-Uni même si elle séjourne moins de 183 jours par année sur le territoire nationale à condition qu’elle possède suffisamment de liens.

Il faut également prendre en compte si l’individu est un arrivant (arriver) ou en partance (leaver) du Royaume-Uni. Sera un arriver, la personne qui n’a pas été résidente au Royaume-Uni durant les 3 années fiscales précédentes. Dans le cas contraire, à savoir si l’individu a été résident au moins une année au cours des 3 années fiscales précédentes, la personne est considérée comme un leaver.

Pour les arrivers, le nombre de liens calculés en fonction du nombre de jours de résidence se décompose comme suit :

–    moins de 46 jours : toujours non-résident ;

–    entre 46 jours et 90 jours : 4 liens au minimum ;

–    entre 91 jours et 120 jours : 3 liens au minimum ;

–    entre 121 et 182 jours : 2 liens au minimum.

Pour les leavers, le tableau est le suivant :

–    moins de 16 jours : toujours non-résident ;

–    entre 16 jours et 45 : 4 liens au minimum ;

–    entre 46 jours et 90 jours : 3 liens au minimum ;

–    entre 91 jours et 120 jours : 2 liens au minimum ;

–    entre 121 et 182 jours : 1 lien au minimum.

Recommandations : Il est crucial pour la personne qui souhaite être résidente ou non-résidente au Royaume-Uni de conserver tous les documents nécessaires afin de prouver son statut (billets d’avions, factures,). La tenue d’un carnet avec un décompte des jours et des activités est vivement conseillée.

Parmi les documents à prendre en compte figurent, les factures d’eau, de gaz et d’électricité, les souscriptions à des clubs, l’engagement du personnel de maison, les envois de la poste, les assurances, la présence du conjoint et des enfants, les factures de maintenance, les factures de téléphone, de télévision, les notes de restaurants, les comptes bancaires, les factures de nourriture, le paiement des taxes locales et les factures de cartes de crédit.

S’agissant des tests relatifs au travail (work tie) ou aux maisons (accomodation tie), il faut éventuellement soumettre aux autorités les contrats de travail, les billets d’avions, les visas figurant dans le passeport, les contrats de baux, les actes et les contrats de vente de propriétés.

D) Le principe du split year

En principe, un individu est taxé sur l’année fiscale complète quand bien même il prendrait la résidence au Royaume-Uni en cours d’année.

Depuis avril 2013, si certaines conditions sont remplies, les contribuables ont la possibilité de diviser l’année fiscale en deux : la période où ils sont considérés et taxés comme résidents et celle où ils ne le sont pas. A noter que les CDI peuvent déroger à ce régime.

Ces conditions sont les suivantes :

Pour les personnes qui quittent le Royaume-Uni et qui ont été résidentes l’année fiscale précédente ;

–    Elles commencent un travail à plein temps à l’étranger et deviennent non-résidentes l’année suivante selon l’automatic overseas test ;

–    Elles accompagnent un époux/un partenaire enregistré qui commence un emploi à plein temps à l’étranger ; ou

–    Vivent à l’étranger, ne possèdent plus de maison au Royaume-Uni (pas forcément au 6 avril de l’année fiscale considérée) et à partir de ce moment ne passent pas plus de 15 jours au Royaume-Uni durant l’année fiscale en cause, deviennent résident fiscal dans un autre pays après 6 mois ou sont présentes chaque jour dans ce pays ou encore possèdent leur seule maison dans celui-ci et demeurent non-résidentes au Royaume-Uni l’année suivante.

Pour les personnes qui arrivent au Royaume-Uni (non-résidents l’année précédente) ;

–    Et qui à un moment donné durant l’année fiscale considérée commencent à avoir leur seule maison au Royaume-Uni pour le reste de l’année et n’étaient pas résidentes avant ce moment selon le sufficient ties test ;

–    Commencent un emploi à plein temps au Royaume-Uni et deviennent résidentes à partir de ce moment selon l’automatic UK test et n’étaient pas résidentes avant ce moment selon le sufficient ties test ;

–    Reviennent ou se relocalisent au Royaume-Uni après une période de travail à temps complet à l’étranger (non-résidentes selon l’automatic overseas test pendant l’année précédente et jusqu’à la date de retour) et étaient résidentes au Royaume-Uni pendant une ou plusieurs années au cours des 4 années fiscales précédentes et demeurent résidentes au dans ce pays l’année suivante ;

–    Accompagnent un époux/un partenaire enregistré visé à l’alinéa précédent ;

–    A un moment donné durant l’année fiscale considérée commencent à avoir une maison au Royaume-Uni et la conservent l’année fiscale suivante et deviennent résidentes à partir de ce moment, ne l’étaient pas avant selon le sufficient ties test et demeurent résidentes l’année suivante.

A noter enfin que le droit anglais prévoit des règles spéciales pour la non-résidence temporaire afin d’éviter que des contribuables quittent le Royaume-Uni pendant une année ou deux afin de réaliser des gains en capitaux substantiels.

En résumé, le contribuable doit être non-résident au Royaume-Uni pendant au minimum 5 ans pour échapper à l’impôt sur certains revenus et les gains en capitaux lorsqu’il revient dans le pays. La règle ne concerne que les résidents de longue durée (au-delà de 4 ans sur les 7 années fiscales avant le départ).

IV) L’impôt sur les successions et les donations au Royaume-Uni

Une personne domiciliée ou deemed domiciled au Royaume-Uni sera soumise à l’impôt sur les successions (IHT) s’agissant de ses biens mondiaux. L’IHT n’est pas prélevée sur les biens situés à l’étranger des personnes non-domiciliées mais résidentes au Royaume-Uni. En revanche, tout bien local appartenant à une personne non-domiciliée résidente ou non au Royaume-Uni est soumis à l’impôt sur les successions.

Par bien local, on entend bien évidement les immeubles situés dans le pays, les comptes bancaires ouverts au Royaume-Uni, les actions nominatives dont le registre est tenu au Royaume-Uni ou celles au porteur déposées dans ce pays, les créances dont le débiteur est résident au Royaume-Uni (le régime est différent de celui applicable aux gains en capitaux, voir ci-dessous sous V)B)), les polices d’assurance-vie si l’assurance qui émet la police possède son siège au Royaume-Uni, le capital provenant de l’activité déployée depuis le Royaume-Uni, etc.

L’impôt sur les successions (IHT) est prélevé sur la valeur de marché du bien au moment du décès (les dettes peuvent être déduites mais la dette étrangère ne permet généralement de déduire que la valeur des biens étrangers ; De même, on ne peut pas déduire une dette qui a servi à financer un bien exonéré (voir ci-dessous)). Pour l’année fiscale 2017/2018, les premiers £325’000 de valeur sont exonérés d’impôts (Nil Rate Band). Au-delà de ce montant, le taux s’élève à 40%, peu importe le lien de parenté avec le de cujus.

S’agissant des donations inter vivos, il convient de distinguer les Lifetime Chargeable Transfers (LCT) des Potentially Exempt Transfers (PET).

La plupart des donations sont des PET (exemptées d’impôts au moment du transfert). Les LCT sont typiquement les transferts de biens dans des trusts ou des sociétés et sont immédiatement imposables. Le taux s’élève à 20% (les £325’000 d’exonération s’appliquent également et ce montant est renouvelable tous les 7 ans ; à noter que ce sont les donations les plus anciennes qui sont couvertes en premier par le montant de l’exonération).

En revanche, tant pour les PET que les LCT, une correction du taux est faite si le donateur décède dans les 7 ans dès la date de la donation. Le taux (la différence entre 40% et 20% pour les LCT et 40% pour les PET) est progressivement diminué (progressive taper relief) si la période entre la date du décès du donateur et celle de la donation est supérieure à 3 ans.

En principe, afin que la donation soit reconnue, le donateur ne doit plus utiliser le bien en question ou conserver un intérêt dans celui-ci, sinon les autorités considèrent qu’il demeure dans la succession (reservation of benefit rule), sauf pour les donations entre époux exemptées.

De nombreuses exceptions et exemptions sont possibles comme par exemples celles en faveur du conjoint (voir ci-dessous), le business property relief (qui peut être total), l’exemption des comptes bancaires situés au Royaume-Uni mais libellés en monnaie étrangère appartenant à des personnes non-domiciliées et non-résidentes, ou encore les œuvres d’art appartenant à des étrangers mais situées au Royaume-Uni dans le but d’y être exposées au public ou afin d’y être restaurées.

Sont également exonérés certains papiers-valeurs (notamment les bons du gouvernement) ou parts dans des unit trusts appartenant à des personnes non-domiciliées.

Les conjoints/partenaires enregistrés sont totalement exonérés de l’impôt (et partant ils n’utilisent pas le montant du Nil Rate Band) sur les successions et les donations (entre eux) sauf si – et uniquement si – le transfert de propriété a lieu d’une personne domiciliée au Royaume-Uni en faveur d’un époux/épouse domicilié(e) à l’étranger.

Dans toutes les autres hypothèses (donation entre époux tous deux domiciliés ou non-domiciliés au Royaume-Uni, décès de l’époux domicilié à l’étranger et transfert des biens à l’épouse domiciliée à Londres, etc.), l’exemption s’applique.

Si celle-ci n’est pas disponible, une exonération à hauteur de £325’000 est applicable et ce montant s’ajoute au Nil Rate Band (l’époux peut donc donner à sa femme la somme totale de £650’000 sans payer d’impôts). Cette exonération n’est toutefois valable qu’une seule fois et est épuisée avant le Nil Rate Band. Il convient également de prêter attention à la reservation of benefit rule : si le donateur garde l’usage de la chose transférée, il n’y a pas donation pour la part excédant les £325’000 et celle-ci reste ainsi dans la succession du donateur.

Depuis 2013, les conjoints/partenaires enregistrés domiciliés à l’étranger peuvent faire une élection de droit afin d’être considérés comme domiciliés au Royaume-Uni uniquement pour la IHT, ce qui permet de bénéficier du régime de l’exonération totale. Toutefois, ils seront alors considérés comme domiciliés dans le cadre de leur propre succession et donc taxés sur l’ensemble de leurs biens mondiaux au moment de la mort. Cette élection peut intervenir en tout temps après le mariage ou dans les 2 ans après la mort de la personne domiciliée. Elle devient effective à la date de l’élection ou à celle du décès, et demeure irrévocable tant que l’époux non-domicilié est résident au Royaume-Uni. Elle cesse après 4 années fiscales complètes de non résidence.

A noter encore que depuis fin 2007, l’époux survivant peut bénéficier du montant du Nil Rate Band non utilisé par le défunt (on parle de Transferable Nil Rate Band) dans le cadre de sa propre succession.

Aussi, de nouvelles règles sont applicables depuis 2017 afin d’exonérer les donations faites aux descendants du De cujus d’impôts sur le logement de famille (jusqu’à £175’000 de la valeur taxable à compter de l’année fiscale 2020/2021) pour les successions au-delà de £2M.

Enfin, depuis 2017, de nouvelles règles s’appliquent en ce qui concerne la détention de propriétés résidentielles situées au Royaume-Uni par l’intermédiaire de sociétés/partnerships/prêts/intérêts offshores. En effet, avant cette date, il était courant pour les personnes non domiciliées au Royaume-Uni de détenir leurs biens immobiliers locaux notamment au moyen de sociétés offshores. Ainsi, les actions étrangères de ladite société constituaient des biens non soumis à l’IHT. Ce régime a toutefois pris fin au 6 avril 2017.

A noter que ce n’est pas la propriété immobilière en tant que telle qui est soumise à l’impôt mais la contre-valeur des actions de la société. Par ailleurs, les prêts sont également soumis : ainsi, si un père, résident en Suisse, prête de l’argent à sa fille pour l’achat d’un bien immobilier à Londres par l’intermédiaire d’une société appartenant à cette dernière, le premier sera soumis à l’IHT en cas de décès.

Les règles mentionnées ci-dessus peuvent différer selon les conventions de double imposition signées par le Royaume-Uni (il y en a peu toutefois). Des exceptions à ce régime ont notamment été convenues avec la France, l’Italie, l’Inde et le Pakistan où le régime de deemed domiciled ne s’applique pas pour déterminer le domicile de la personne (les CDI doivent être très attentivement étudiées car elles peuvent ne concerner que l’impôt sur les successions et non celui sur les donations).

Par ailleurs, dans les cas où il n’y a pas de CDI, le Royaume-Uni accorde un crédit d’impôt partiel sur la taxe déjà payée à l’étranger (unilateral relief qui donne la priorité sur les CDI si les règles de celles-ci sont moins favorables).

Il y a également un statut spécial pour les diplomates.

Recommandations : au vu de ce qui précède et afin d’éviter l’IHT, il est conseillé aux personnes résidentes mais non-domiciliées au Royaume-Uni de prendre des mesures de planification successorale telles que :

–    éviter de conserver des biens au Royaume-Uni dont ils n’auraient pas l’utilité ;

–    sauf pour les propriétés résidentielles situées au Royaume-Uni, procéder à l’interposition de sociétés offshores s’agissant des biens qui se trouvent dans ce pays, étant précisé que la théorie de la transparence ne s’applique pas en matière d’IHT. ;

–    procéder à la création d’un Excluded Property Trust (il faut toutefois tenir compte des autres conséquences notamment s’agissant de l’impôt sur le revenu, les gains en capitaux, etc.) ;

–    surveiller à partir de quand ils seront considérés comme deemed domiciled ;

–    constituer une assurance-vie afin de couvrir l’impôt sur les successions.

V) L’imposition selon le régime ordinaire (arising basis) au Royaume-Uni

En premier lieu, on relèvera qu’au Royaume-Uni l’année fiscale débute le 6 avril et se termine le 5 avril de l’année suivante. Cela peut engendrer des complications avec les législations d’autres pays (double résidence, double imposition, etc.).

A) L’impôt sur le revenu

Les personnes résidentes et domiciliées au Royaume-Uni sont toujours imposées sur leurs revenus mondiaux.

Les individus résidents mais non-domiciliés au Royaume-Uni sont également en principe taxés sur leurs revenus de source locale et étrangère. Ils peuvent toutefois bénéficier, à certaines conditions, de l’imposition selon le régime de la remise (voir ci-dessous sous VI)). Dans cette hypothèse, le contribuable n’est alors imposé que sur ses revenus locaux et étrangers, si ces derniers sont versés ou utilisés au Royaume-Uni.

Les personnes non-résidentes et non-domiciliées dans le pays sont taxées uniquement sur le revenu de source britannique. Certains types de revenus bénéficient d’un traitement de faveur, notamment s’agissant des dividendes (pas d’imposition mais reconnaissance fictive des autorités anglaises d’une taxation à hauteur de 7.5% à la source à utiliser sans le cadre d’une CDI) et des intérêts (ils sont exonérés depuis avril 2016 mais le contribuable perd alors le montant des déductions personnelles). Par ailleurs, les non-résidents ne paient pas d’impôts sur certains investissements regroupés sous le nom de FOTRA (Free of Tax to Residents Abroad), comme par exemple les bons du trésor (Government Treasury Stocks). Aussi, des aménagements dans les versements des impôts peuvent être accordés (comme par exemple le « Non-UK Resident Landlord Scheme »). Enfin, selon leur nationalité et/ou leur résidence (UE, Norvège, Liechtenstein, Islande, etc.), ils peuvent bénéficier du régime des déductions personnelles (les Etats-Unis sont toutefois exclus).

Par revenu local, on entend celui qui trouve sa source au Royaume-Uni. On vise ainsi par exemple, les intérêts provenant d’un compte bancaire situé au Royaume-Uni, les dividendes de sociétés anglaises, les loyers perçus d’un immeuble situés à Londres, les versements d’un fond de pension britannique, etc.

S’agissant des revenus du travail, il convient de distinguer trois cas, selon le statut du contribuable (résident ou domicilié), son lieu de travail et son employeur. Ainsi :

–    si la personne est résidente et domiciliée au Royaume-Uni, elle est toujours imposée sur les revenus de son travail, y compris si l’activité est déployée à l’étranger ;

–    si la personne n’est ni résidente, ni domiciliée au Royaume-Uni, elle est taxée sur le salaire provenant de l’activité déployée dans ce pays ;

–    si l’individu est résident mais non-domicilié, il sera imposé selon le régime ordinaire, sur son salaire local et étranger. Si la personne bénéficie du régime de la remise, des règles spéciales s’appliquent (voir ci-dessous sous VI)).

Les taux d’imposition pour l’année 2017/2018 sont les suivants :

–    les revenus autres que les dividendes sont imposés au taux basic de 20% jusqu’à £33’500 (après déduction des personal allowances), au taux supérieur de 40% au-delà de £33’500 et au taux additionnel de 45% au-dessus de £150’000. La déduction personnelle est actuellement de £11’500. Elle est réduite graduellement et proportionnellement à partir de £100’000 (£1 de déduction pour £2 de revenu). Ainsi, au-delà de £123’000 de revenu taxable, la déduction personnelle n’est plus possible.

–    les dividendes sont taxés au taux basic de 7.5%, supérieur de 32.5% et additionnel de 38.1% avec une exonération sur les premiers £5’000 (£2’000 à partir de 2018/2019) (à noter que pour calculer le taux il convient de prendre en compte le revenu total (dividendes, gains en capitaux et autres revenus)).

–    les intérêts sur l’épargne (personal savings allowance) peuvent être déduits à hauteur de £5’000 au maximum si les autres revenus du contribuable sont inférieurs à £16’850.

–    enfin, une déduction d’épargne supplémentaire sur les intérêts de £1’000 pour les contribuables basiques est accordée et de £500 pour les contribuables de la catégorie supérieure.

A noter que les cas de double imposition sont généralement évités par la méthode de l’exemption ou du crédit d’impôt qui peut être prévue soit par les CDI soit par le droit interne anglais.

B) L’impôt sur les gains en capitaux (CGT)

A la différence du revenu, la taxation des gains en capitaux se fait actuellement en fonction de la résidence du contribuable uniquement et non du lieu de situation de ses biens (sauf pour la propriété immobilière résidentielle et peut-être à partir de 2019 pour tous les biens immobiliers). Cela engendre une différence principalement pour les personnes non-résidentes et non-domiciliées.

Les résidents domiciliés au Royaume-Uni sont taxés sur les gains en capitaux mondiaux, y compris sur les propriétés immobilières situées à l’étranger (sous réserve des conventions de double imposition). Ce même régime s’applique aux personnes résidentes mais non-domiciliées sous réserve de l’application du régime de la taxation par la remise (dans ce cas, il faut faire attention de ne pas rapatrier des biens avec un fort potentiel de plus-value au Royaume-Uni étant précisé que c’est la date du rapatriement au Royaume-Uni qui compte et non celle de la disposition du bien en question). Les personnes qui deviennent deemed domiciled au Royaume-Uni font l’objet de règles particulières (voir ci-dessous sous VI)A)).

Dans la perspective d’une imposition selon le principe de la remise, sont considérés comme des biens britanniques, les actions de sociétés locales, les actions de sociétés étrangères si le lieu où les actions (actions au porteur) ou le registre des actions (actions nominatives) sont conservés est le Royaume-Uni ainsi que les dettes si le créancier est situé au Royaume-Uni (sous réserve des comptes bancaires libellés en monnaie étrangère et situés à l’étranger).

Par ailleurs, depuis avril 2012, tous les retraits en cash effectués à partir de comptes bancaires libellés en monnaie étrangère sont exonérés d’impôt sur les gains en capitaux (gains de change notamment). A noter enfin que les polices d’assurance sont traitées comme des biens locaux si elles sont soumises au droit anglais au moment de leur souscription.

Enfin, les personnes non-résidentes et non-domiciliées ne sont pas imposées sur les gains en capitaux de source britannique et étrangère sous réserve des propriétés immobilières résidentielles, y compris si celles-ci sont louées (Non Residents Capital Gains Tax, NRCGT). Ce régime, applicable depuis le 6 avril 2015 aux personnes physiques et morales ainsi qu’aux trusts, ne prend en compte dans le calcul que les gains réalisés après le 5 avril 2015 (régime par défaut, d’autres solutions sont possibles notamment s’il y a eu une perte globale sur toute la période de détention). Une déclaration fiscale doit être remplie dans les 30 jours dès la vente (le paiement de la taxe également en principe). Il n’y a pas d’imposition si la vente concerne la résidence principale du contribuable (Principal Private Residence Relief). Depuis avril 2015, les personnes non-résidentes peuvent bénéficier de ce régime s’ils prouvent que leur conjoint/partenaire est résident au Royaume-Uni ou si eux-mêmes ou leur conjoint/partenaire passent plus de 90 jours dans la maison par année fiscale.

Une autre exception concerne les activités professionnelles déployées aux Royaume-Uni via une succursale ou un établissement stable. La vente de biens utilisés pour l’exploitation de cette activité (matériel, terrain, etc.) entraine une imposition sur le gain en capital. Cela ne concerne pas les sociétés (qui restent soumises à l’imposition sur les sociétés) mais les partnerships, les raisons individuelles, etc.

Enfin une dernière exception concerne les personnes temporairement non-résidentes au Royaume-Uni (voir ci-dessus sous III)D)).

Recommandations : il résulte de ce qui précède que sous réserve des propriétés immobilières qui sont toujours taxables, il vaut la peine de réaliser toutes les plus-values britanniques avant de prendre la résidence au Royaume-Uni.

Les taux applicables pour l’année fiscale 2017/2018 sont les suivants :

–    10% pour la tranche basique ;

–    20% pour les tranches supérieures ou additionnelles ;

–    18% ou 28% pour les biens immobiliers et les intérêts reportés.

Pour calculer le taux, il convient d’additionner le revenu (en déduisant les déductions personnelles) avec les gains en capitaux (en déduisant également les exemptions, etc.). Si le total est moins que le seuil de taxation basique de £33’500 le taux sera de 10%. S’il est supérieur, le taux est de 20%.

Une exemption annuelle à hauteur de £11’300 est accordée pour les personnes physiques. Il y a d’autres exemptions s’agissant notamment des gains réalisés suite à la vente de sa résidence habituelle (principal private residence relief PPR, il n’y a pas d’imposition dans cette hypothèse) ou ceux réalisés lors de transferts entre époux (pas d’imposition également). Il y a aussi une réduction du taux (taux effectif de 10% jusqu’à concurrence de £10M à vie) pour la vente de son entreprise (entrepreneurs’ relief) ou la vente d’actions non-cotées en bourse (investors’ relief : 10% jusqu’à £10M à vie si les actions ont été émises après le 16 mars 2016 et détenues pendant au minimum 3 ans à compter du 6 avril 2016).

VI) L’imposition selon le régime de la remise (remittance basis) au Royaume-Uni

A) Généralités

Comme nous l’avons vu, en règle générale, les personnes résidentes au Royaume-Uni sont imposées sur leurs revenus et gains en capitaux de source mondiale (arising basis). Certaines personnes peuvent toutefois bénéficier d’un régime plus favorable, celui de la remise (remittance basis). Les personnes résidentes et domiciliées au Royaume-Uni sont néanmoins toujours imposées selon le régime ordinaire.

Dans cette hypothèse, les revenus et gains en capitaux étrangers sont exonérés d’impôts à moins qu’ils ne soient rapatriés (au sens large) dans le pays. Il n’y a en revanche pas de changements concernant les revenus et les gains de source anglaise qui restent imposables en plein.

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On relèvera que depuis avril 2017, le principe de la remise ne peut plus être invoqué que pour une durée de 15 ans au maximum (15 ans de résidence sur les 20 dernières années, on parle de « deemed domiciled »). Le calcul est remis à zéro si une personne résidente pendant plus de 15 ans au Royaume-Uni devient non-résidente pendant au moins 6 ans. Il convient également de prendre garde au régime du split year qui est pris en compte dans ce calcul (théoriquement un peu plus de 13 années civiles suffisent pour être considéré comme réputé domicilié au Royaume-Uni).

De même, les personnes ayant eu un domicile d’origine au Royaume-Uni ne peuvent pas bénéficier de ce régime préférentiel (ni celui de l’OWR, voir ci-dessous) lorsqu’ils reviennent au pays.

On relèvera toutefois que les individus qui deviennent deemed domicilied au Royaume-Uni au 6 avril 2017 selon les nouvelles règles, peuvent à leur choix et en tout ou partie, bénéficier du régime dit de « rebasing » à condition qu’ils aient payé la Remittance Basis Charge (voir ci-dessous) ; En clair, dans le calcul des gains en capitaux, le fisc prend en compte la plus-value réalisée sur les biens étrangers (soit ceux qui ne sont pas situés au Royaume-Uni depuis le 16 mars 2016 ou si acquis postérieurement à compter de la date d’acquisition) à leur valeur vénale au 5 avril 2017 uniquement. En revanche, si le bien en question a subi une moins-value avant cette date, le contribuable peut toujours renoncer au régime du rebasing concernant celui-ci.

On relèvera également qu’il n’y a aucune obligation de laisser le gain en capital antérieur au 5 avril 2017 offshore. Toutefois, le rebasing ne sera « total » que si le bien a été acheté avec du clean capital (voir ci-dessous). Si celui-ci a été acquis au moyen de revenus ou de gains en capitaux non-taxés (en vertu du principe de la remittance), il conviendra de s’acquitter de l’impôt en cas de rapatriement de la somme ayant permis d’acheter le bien en question.

Le régime du rebasing ne sera pas applicable aux personnes qui deviennent deemed domiciled après le 6 avril 2017 et celles qui ont eu un domicile d’origine.

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A noter que, depuis 2008, l’application du régime de la remise n’est pas automatique et doit être demandé par le contribuable. Bien qu’il y ait une initiative visant à imposer le régime de la remise pendant une durée minimum de 3 ans, le choix du contribuable à l’heure actuelle est libre, en ce sens qu’il peut choisir chaque année d’être imposé selon le régime d’imposition ordinaire ou celui de la remise (en cochant la case appropriée dans la forme SA109 avant le 31 janvier suivant la fin de l’année fiscale).

Parfois, le principe de la remise s’applique automatiquement sans demande du contribuable (un opting-out est toujours possible). Il s’agit des cas suivants (on vise principalement les enfants et les époux/épouses qui accompagnent leur conjoint) :

1)  l’individu à moins de £2’000 de revenus ou de gains en capitaux non-remis au Royaume-Uni par année fiscale ;

2)  la personne est âgée de moins de 18 ans pendant l’année fiscale considérée et n’a pas de revenus ou de gains en capitaux de source anglaise (ou moins de £100 de revenus provenant d’investissements déduits à la source) et aucune remise au Royaume-Uni ;

3)  le contribuable est âgé de plus de 18 ans, n’a pas été résident pendant plus de 6 ans sur les 9 dernières années fiscales et n’a pas de revenus ou de gains en capitaux de source anglaise (ou moins de £100 de revenus provenant d’investissements déduits à la source) et aucune remise au Royaume-Uni (automatique pendant les 7 premières années).

L’avantage est que le contribuable n’a pas à payer la Remittance Basis Charge (voir ci-dessous) et ne perd pas certains droits (déductions personnelles, imposition préférentielle des gains en capitaux et des dividendes, FLR, etc.).

B) Conditions

La taxation selon la remise est possible uniquement pour deux catégories de personnes :

1)  Les résidents non-domiciliés (RND) ;

2)  Les personnes qui bénéficient de la qualification d’Overseas Workdays Relief (OWR).

D’emblée, on précisera qu’une personne peut jouir de ces deux statuts à la fois ce qui lui permet de cumuler les avantages des deux régimes (le régime d’OWR est plus favorable au contribuable car il couvre une catégorie de revenus plus étendue).

Les résidents non-domiciliés sont exonérés sur les revenus et les gains en capitaux étrangers. On entend par là notamment :

–    les revenus, qui ne proviennent pas d’une activité lucrative dépendante (intérêts, pensions, dividendes, loyers, revenus de l’activité indépendante, etc.), de source étrangère ;

–    le salaire versé par un employeur étranger et se référant à une activité déployée à l’étranger uniquement (en cas d’activité lucrative à l’étranger et au Royaume-Uni pour un employeur étranger, il n’est pas possible de bénéficier de cette exonération) ;

–    les prestations en nature (actions gratuites, etc.) accordées dans le cadre d’un emploi sans lien avec le Royaume-Uni ;

–    les gains en capitaux portant sur des biens situés à l’étranger (immeubles, etc.).

Pour bénéficier du régime d’OWR, le contribuable ne doit pas être domicilié au Royaume-Uni pendant l’année en cause et n’avoir pas été résident dans le pays pendant les 3 années fiscales précédentes. Si les conditions sont remplies, il sera exonéré de tous les revenus de source étrangère non-rapatriés pendant 3 ans (c’est-à-dire y compris le salaire versé par un employeur anglais pour une activité lucrative déployée à l’étranger et au Royaume-Uni, mais uniquement sur la part de travail « étrangère »).

Recommandations : attention toutefois à s’assurer en pratique d’avoir deux contrats séparés, l’un pour la part du travail à l’étranger et l’autre pour la part de travail au Royaume-Uni.

C) La « Remittance Basis Charge »

Par ailleurs, les contribuables, âgés de plus de 18 ans (la période de résidence antérieure à la majorité est comptée dans le calcul), résidents non-domiciliés  sur le territoire pendant 7 ans sur les 9 dernières années fiscales (les arrivées en cours d’année sont comptées ainsi que les années de « double résidence » en application d’une convention de double imposition) doivent s’acquitter dès la 8ème année fiscale d’une Remittance Basis Charge (RBC), soit d’une taxe annuelle de £30’000 s’ils entendent réclamer le régime de l’imposition d’après la remise. Cette taxe s’élève à £60’000 après 12 ans de résidence (sur les 14 dernières années) et jusqu’en 2017 à £ 90’000 après 17 ans de résidence (sur les 20 dernières années). Cette taxe vient s’ajouter sur les impôts de source anglaise et sur l’impôt dû en cas de remise au Royaume-Uni.

La RBC n’est pas une flat fee mais une vraie taxe prélevée sur des fonds déterminés (nominated funds). En conséquence, le contribuable doit choisir le revenu/gain en capital étranger concerné par la RBC (la taxe ainsi calculée découlant de la nomination du revenu/gain en capital en cause peut correspondre exactement ou non au montant de la RBC). La nomination permet ainsi en principe (mais pas toujours) de demander un crédit d’impôt conformément à l’application des conventions de double imposition.

Recommandations : le revenu/gain en capital concerné peut être librement rapatrié au Royaume-Uni mais des règles très strictes et complexes de priorité s’appliquent, raison pour laquelle il est conseillé en principe de ne jamais rapatrier les fonds nominés et d’éviter tout accident involontaire en nominant un montant minimal (£1 par exemple mais pas plus de £10, à noter toutefois que les £29’999 payés seront définitivement perdus puisque les revenus/gains en capitaux non-nominés seront taxés à nouveau s’ils sont rapatriés au Royaume-Uni). Il est également utile d’utiliser un compte bancaire spécial pour le revenu/gain en capital nominé ainsi que de ne pas utiliser une carte bancaire reliée à ce compte qui pourrait être utilisée au Royaume-Uni (dans le cas contraire, le revenu risque d’être considéré comme rapatrié). Il est finalement recommandé d’éviter d’utiliser ces revenus pour acheter des biens mobiliers susceptibles d’être envoyés en Angleterre mais plutôt de les dépenser pour l’achat ou l’entretien de biens immobiliers situés à l’étranger.

La RBC ne s’applique pas, par définition, aux OWR. La RBC doit être payée depuis un compte offshore pour éviter d’être taxée comme remise.

D) Autres conséquences de l’imposition d’après la remise

Outre le fait qu’ils doivent payer la RBC, les bénéficiaires du régime de la remise ne peuvent en principe plus revendiquer les déductions personnelles (personal allowance) ainsi que l’exemption annuelle sur les gains en capitaux (capital gains tax annual exemption). Il y a des exceptions prévues pour les doubles résidents dans certaines CDI notamment avec la Suisse, le Belgique, la France et l’Allemagne.

Par ailleurs, les dividendes étrangers versés au Royaume-Uni sont taxés à des taux supérieurs (respectivement 20%, 40% et 45%) par rapport au régime ordinaire (7.5%, 32.5% et 38.1% pour l’année 2017/2018).

Ensuite, les personnes qui paient la RBC seront taxées à hauteur de 20% ou 28% sur les gains en capitaux remis (pour ceux qui ne paient pas la taxe le taux est de 10%/18% ou 20%/28% dépendant du revenu/gain en capital total). Dans les deux cas, ils ne bénéficient pas de l’exemption annuelle correspondante.

Enfin, un régime spécifique s’applique s’agissant du traitement fiscal des pertes sur la vente de biens situés à l’étranger (foreign loss relief, FLR).

Avant la 1ère demande à être imposé selon la remise (ou en cas de remittance automatique), le contribuable peut déduire la totalité des pertes (étrangères et locales). Dès cette 1ère demande, l’individu doit faire un choix définitif dans les 4 ans dès la fin de l’année fiscale en cause s’il souhaite ou non bénéficier du FLR. S’il refuse le FLR, il ne peut déduire que les pertes en capital britanniques à l’exception des pertes étrangères. S’il accepte le FLR, pendant les années où il est taxé selon le régime ordinaire, il pourra déduire les pertes à l’étranger dans n’importe quel ordre. En revanche les années où il sera taxé selon la remise, un certain ordre de compensation devra être respecté. Cet ordre est le suivant (pour les pertes locales et étrangères) : on compense en premier lieu avec les gains en capitaux étrangers remis, puis les gains en capitaux étrangers non remis et enfin les gains en capitaux britanniques (par exemple X fait un gain en capital de £15 à l’étranger (non remis), un gain local de £10 et une perte locale de £15 : X ne peut pas éviter le gain de £10 ; Si X avait refusé le FLR, il aurait n’aurait pas payé de taxes).

Recommandations : ainsi, un individu qui fait d’importants gains en capitaux étrangers mais qui n’a pas l’intention de les rapatrier ne devrait pas choisir le régime du FLR. Par ailleurs, on relèvera qu’on ne peut compenser une perte qu’avec du revenu/gain en capital obtenu pendant l’année en cours (on ne peut pas capitaliser du revenu/gain en capital pour des pertes futures). On peut toutefois reporter une perte.

En conclusion, le choix de la remittance ou du régime ordinaire requiert une analyse détaillée du client. Certains cas sont clairs et d’autres beaucoup moins. En toute hypothèse, la RBC doit être prise en considération (il suffit de retenir que pour une RBC de £30’000 correspond un revenu étranger de £66’000 ou un gain étranger de £107’000 ; s’agissant d’une RBC à £60’000, les montants correspondent respectivement à £133’000 et £214’000). En règle générale, le régime de la remise est plus intéressant pour les personnes ne souhaitant rester que pour un court séjour au Royaume-Uni. Idem, on demandera l’application de la remise les années où l’on a l’intention de réaliser d’importants gains en capitaux sur des biens étrangers et dont le profit restera à l’étranger

E) Cas d’applications

Afin d’éviter de mauvaises surprises, il est toutefois essentiel que le contribuable comprenne dans quels cas il y a remise au Royaume-Uni. Depuis 2008, la notion a été considérablement élargie.

Préalablement, il convient de définir la notion de « clean capital » : il s’agit de fonds qui ne sont pas concernés par la taxation sur la base de la remittance car ils ne constituent pas du revenu ou des gains en capitaux (par exemple, l’argent provenant d’une succession), ils ont déjà été taxés selon la taxation ordinaire (arising basis) ou trouvent leur source avant la prise de résidence du contribuable au Royaume-Uni. Dans cette hypothèse, les fonds peuvent être librement importés. Le clean capital account peut être situé au Royaume-Uni (soumis à l’impôt sur les successions) ou à l’étranger. Le compte ne doit en principe pas être déclaré aux autorités britanniques. Parfois, la séparation des comptes (voir ci-dessous) (notamment s’agissant des gains en capitaux qui ne peuvent pas être séparés du capital) ne suffit pas d’où l’intérêt de recourir à des prêts octroyés par des banques et garantis par le clean capital account. Attention de ne pas verser les dividendes d’une société offshore après la prise de résidence au Royaume-Uni même si ceux-ci ont été acquis avant. Il s’agit de revenu étranger et non plus de clean capital dans cette hypothèse.

D’une manière générale, il y a remise lorsque une somme d’argent ou tout autre bien, provenant directement ou indirectement de revenus ou de gains en capitaux étrangers, est ramené (brought), reçu (received) ou utilisé (used) au Royaume-Uni par ou dans l’intérêt d’une personne concernée (for the benefit of a relevant person). Ainsi, l’achat d’une voiture à l’étranger avec des revenus étrangers puis ramenée au Royaume-Uni constitue une remittance dans ce pays (on prendra toujours en considération le montant à l’origine de la transaction et non la valeur vénale du bien au moment où il est rapatrié). Le problème étant que le client peut ne plus se souvenir avec quels fonds il a acheté un bien d’où l’importance de garder une trace de chaque paiement.

On peut également citer les cas suivants :

–    un service (par exemple le travail du personnel de maison) est fourni au Royaume-Uni à ou dans l’intérêt d’une personne concernée et la contre-valeur pour ce service est payée par des fonds ou des biens situés à l’étranger (peu importe que le versement intervienne sur le compte bancaire local ou étranger du bénéficiaire). Il va sans dire que cela pose des problèmes jusqu’à la rémunération des conseillers juridiques du résident. Une exception est toutefois possible s’agissant des services portant sur des biens totalement ou principalement situés à l’étranger à condition que le paiement du service intervienne sur le compte bancaire du conseiller situé à l’étranger (deux factures sont nécessaires, l’une portant sur les biens britanniques et l’autre sur les biens étrangers).

–    des fonds ou des biens situés à l’étranger servent à payer une dette (ou les intérêts d’une dette immobilière sauf pour celles contractées avant le 6 avril 2008) de source anglaise. Ici encore, peu importe que le paiement intervienne sur un compte local ou non. Depuis août 2014, les fonds situés à l’étranger (pas le clean capital) qui servent de garantie d’une dette anglaise (à condition que l’argent emprunté soit rapatrié au Royaume-Uni) sont aussi concernés et l’on considère qu’il y a remise.

Par personne concernée on entend :

–    la personne au bénéfice de ce statut fiscal ;

–    le conjoint, le partenaire enregistré ainsi que le concubin ;

–    les enfants et petits-enfants mineurs (attention aux versements à un enfant majeur (absence de remise) qui ensuite utilise l’argent pour l’entretien des petits-enfants mineurs (remise)) ;

–    une société non-cotée locale ou étrangère dont l’une des personnes ci-dessus est actionnaire/participante ;

–    une société détenue à 51% ou plus par une autre société elle-même détenue par une personne mentionnée ci-dessus ;

–    le trustee dont les bénéficiaires sont l’une des personnes mentionnées ci-dessus.

Il ressort de ce qui précède qu’un cadeau fait au Royaume-Uni à son conjoint au moyen de fonds obtenus à l’étranger constitue une remise du donateur. A noter que des problèmes temporels peuvent se produire et conduire à une remittance par exemple si une personne concernée prend la résidence au Royaume-Uni par la suite ou qu’un tiers devient une personne concernée (mariage, etc.).

On peut citer les exemples de remise ci-dessous :

1)  le transfert d’une somme d’argent d’un compte bancaire offshore contenant du revenu étranger sur un compte au Royaume-Uni ;

2)  l’utilisation d’une carte de crédit ou de débit (retrait cash par exemple) au Royaume-Uni couverte par un compte bancaire situé à l’étranger ;

3)  l’utilisation d’une propriété au Royaume-Uni contre paiement au propriétaire de ses vacances à l’étranger.

4)  l’achat d’investissements situés au Royaume-Uni par l’intermédiaire d’un broker étranger. Même si le prix est payé à l’étranger.

Il convient de porter une attention particulière s’agissant des fonds mixtes, soit des fonds composés de revenus acquis sur plusieurs années, de gains en capitaux versés sur plusieurs années ou un mélange de revenu et de capital.

En cas de remise provenant de fonds mixtes, on applique les règles suivantes :

1)  les revenus et gains en capitaux de l’année fiscale en cours sont remis en premier, suivent l’année précédente et ainsi de suite ;

2)  par ailleurs, sont remis dans l’ordre suivant :

–   le revenu britannique du travail ;

–   le revenu du travail étranger non taxé à l’étranger ;

–   le revenu étranger non soumis à taxation à l’étranger ;

–   les gains en capitaux étrangers non soumis à taxation à l’étranger ;

–   le revenu du travail étranger taxé à l’étranger ;

–   les autres revenus soumis à taxation à l’étranger ;

–   les gains en capitaux soumis à taxation à l’étranger ;

–    le revenu ou les gains en capitaux qui n’appartiennent à aucune des catégories ci-dessus, y compris le clean capital.

Bien entendu, ces règles peuvent avoir un fort impact sur la taxation du contribuable dans la mesure où les 1ères catégories de biens sont soumises à des taux d’imposition plus élevés.

Recommandations : il est donc préférable d’éviter de remettre des fonds mixtes au Royaume-Uni. Par ailleurs, suite aux nouvelles règles qui sont entrées en vigueur en avril 2017, les contribuables concernés ont un délai de 2 années fiscales (jusqu’au 5 avril 2019) pour réarranger (par la création de comptes séparés) les fonds mixtes détenus sur leurs comptes bancaires étrangers (uniquement). Il est donc possible de constituer un clean capital account et de rapatrier des avoirs sans s’acquitter des impôts sur le revenu et sur les gains en capitaux en premier (des problèmes de preuve peuvent toutefois se présenter puisqu’il appartient au contribuable d’établir la source des fonds rapatriés au Royaume-Uni).

Cette opportunité est ouverte à toutes les personnes non-domiciliées et pas uniquement à celles qui deviennent deemed domiciled au 6 avril 2017. Elle ne s’applique pas aux personnes qui ont eu un domicile d’origine.

Enfin, on relèvera que lorsque le contribuable devient deemed domiciled, les fonds situés offshores peuvent quand même être taxés s’ils sont rapatriés au Royaume-Uni. D’un autre côté, les nouveaux gains en capitaux et revenus étant imposés au moment de leur survenance, ils peuvent être librement utilisés dans le pays. Il est donc judicieux d’utiliser ces fonds en premier lieu avant de rapatrier des avoirs « pré-deemed domicile ». Il est également intéressant de réaliser les gains en capitaux étrangers (sous réserve du « rebasing ») ou de procéder au versement de dividendes l’année précédant le changement de statut et de laisser ces avoirs à l’étranger. La constitution d’un trust peut également être une solution.

F) Exceptions

Il existe un certain nombre d’exceptions où l’on considère qu’il n’y a pas remise de biens malgré l’utilisation ou le rapatriement de ceux-ci au Royaume-Uni :

1)  les biens ramenés dans le but d’être réparé ou restauré (à condition qu’ils ne restent pas dans le pays par la suite) ;

2)  les habits, bijoux, montres, chaussures, etc. acquis et payés à l’étranger mais utilisés au Royaume-Uni par une personne concernée pour son usage personnel ;

3)  il en va de même s’agissant des biens (autres que des papier-valeurs) dont la valeur n’excède pas £1’000 ainsi que les biens accessibles au public (collection de tableaux, etc.).

4)  Les biens (autres que des papier-valeurs/argent) rapatriés et utilisés temporairement au Royaume-Uni pour une durée de moins de 276 jours sont aussi exclus du régime de taxation (il est possible de cumuler les catégories par exemple 1 et 4 ou 3 (œuvres d’art accessibles au public) et 4).

5)  enfin, les biens achetés avant le 11 mars 2008 sont également exonérés (cette règle s’applique aussi au revenu réinvesti avant cette date).

A noter que ces exceptions ne s’appliquent que jusqu’à la vente du bien en question sauf si la contre-valeur est sortie du Royaume-Uni dans les 45 jours dès le paiement ou réinvestie dans le Business Investment Relief (voir ci-dessous) ; Par ailleurs, les gains en capitaux réalisés sur la vente de ces biens au Royaume-Uni ne sont pas taxables sauf si les fonds sont rapatriés par la suite dans le pays ; Enfin depuis avril 2013, le vol ou la perte du bien ne lève pas l’exception de même que le paiement provenant de l’assurance si les fonds versés sont sortis du pays dans les 45 jours ou investis dans le business investment relief :

Pour finir, on relèvera qu’il existe depuis avril 2012 (afin d’attirer les capitaux étrangers) d’autres exceptions comme le « Business Investment Relief (BIR) » qui permet aux Res Non Dom taxés sur la remise de procéder à des investissements au Royaume-Uni (en capital ou par le biais de prêts) dans des sociétés opérationnelles (trading companies) aux moyens de fonds provenant de l’étranger et d’être exonérés d’impôts à l’entrée comme à la sortie (délai de 45 jours dès la vente pour sortir les fonds ou les réinvestir). Une vérification préalable que l’investissement visé est exonéré auprès des autorités fiscales est recommandée. A noter qu’au vu du peu de succès rencontré par ce régime, le gouvernement a décidé d’assouplir certaines règles en 2017.

Recommandations : on a vu que les règles sur la remise sont complexes et qu’une erreur peut vite arriver. Préalablement à son arrivée, le contribuable devrait évaluer ses besoins lors de son séjour au Royaume-Uni afin de provisionner le montant du clean capital dont il aura besoin.

Il est toujours conseillé de bien séparer les comptes bancaires comme suit :

  • Disposer d’un compte clean capital qui contiendra uniquement les biens non-soumis à taxation (les parts d’héritage, les donations, etc.), les revenus et les gains en capitaux réalisés avant la prise de résidence au Royaume-Uni ainsi que ceux postérieurs faisant l’objet d’une taxation au Royaume-Uni ;
  • Un compte qui recevra les intérêts provenant du clean capital account ;
  • Un compte pour les autres revenus étrangers qui sera lui-même subdivisé selon les catégories de revenus (dividendes, intérêts, etc.) ;
  • Un compte pour les gains en capitaux étrangers ;
  • Un compte qui recueillera les produits provenant de la vente de biens où des moins-values ont été réalisées (capital loss account).

Il convient également de garder tous les documents relatifs à la source du revenu/du gain en capital, à l’achat ou à la vente des biens ainsi que la source du paiement, de conserver un registre écrit des proches vivant au Royaume-Uni et un inventaire de ses biens avec le lieu de leur localisation. Les cadeaux aux proches aux moyens de revenus/gains en capitaux non taxés doivent également faire l’objet d’une attention accrue.

L’usage de prêts bancaires garantis par le clean capital account est également une bonne solution.

Nous préconisons enfin de réaliser les gains et les revenus latents avant l’arrivée au Royaume-Uni (si tant est que l’on puisse prévoir que ces fonds seront nécessaires pour vivre au Royaume-Uni). Pour rappel, on prend la valeur historique du bien et non la valeur de marché de celui-ci au moment de la remise (attention aux moins-values donc).

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Pour de plus amples informations, nous vous invitons à nous contacter ou à consulter le site Internet de l’HMRC.

Eclairage sur le nouvel Impôt sur la Fortune Immobilière français (IFI)

Origine de l’ IFI

De 1989 à 2017, la France a connu un impôt sur la fortune appelé « Impôt de Solidarité sur la Fortune (ISF) ».

L’ISF était dû lorsque la fortune nette du contribuable dépassait les 1.3m €. Le taux était progressif (entre 0.5% et 1.5%) et l’impôt se calculait à partir d’un seuil de 800’000 €.

Cet impôt avait été largement critiqué ces dernières années, notamment en raison du fait qu’il taxait les personnes disposant d’un patrimoine important mais pas nécessairement de revenus élevés.

Le président Macron avait également déclaré que cet impôt pénalisait les investisseurs de l’économie réelle, promettant ainsi de l’abolir et de le transformer en impôt immobilier uniquement.

Depuis janvier 2018 c’est chose faite, l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) a été supprimé et remplacé par un impôt sur la fortune immobilière (IFI).

Sur la forme, cet impôt reste très critiquable dans la mesure où il taxe uniquement les propriétaires fonciers et non les détenteurs de produits financiers ou de luxe. Aussi, il ne règle pas le problème des personnes disposant de revenus modestes mais d’un important patrimoine immobilier, par exemple reçu suite à un héritage. Enfin, la perte fiscale pour l’Etat français avoisinera plusieurs milliards d’euros.

Régime applicable

Une distinction doit préalablement être faite entre résidents et non-résidents : en effet, les résidents français sont soumis à l’ IFI sur leurs biens immobiliers mondiaux (un délai de grâce de 5 ans est néanmoins accordé aux nouveaux résidents sur leurs biens situés à l’étranger). Les non-résidents en revanche sont uniquement taxés sur leurs propriétés situées en France, sous réserve de dispositions contraires, applicables dans les conventions de lutte contre la double imposition.

Afin de déterminer la valeur seuil du déclenchement de l’impôt (voir ci-dessous), la fortune immobilière totale du ménage est prise en compte, à condition toutefois que les personnes concernées vivent ensemble (époux, enfants mineurs uniquement, partenaires y compris en union libre). Les immeubles commerciaux ne sont pas concernés, de même que les immeubles détenus par des sociétés, sous réserve des exceptions mentionnées ci-dessous.

Ainsi, sont soumis à l’ IFI :

  • Les immeubles bâtis et non bâtis (résidence principale, secondaire, biens immobiliers donnés en location, biens immobiliers en construction, terrain…) ;
  • Les actions de sociétés civiles immobilières (SCI) ;
  • Les parts détenues dans des fonds comme les sociétés civiles de placement immobilier (SCPI) ou les organismes de placement collectif en immobilier (OPCI), y compris celles détenues par l’intermédiaire d’une assurance-vie ;
  • Les actions de sociétés détenant un immeuble, à concurrence de la valeur de celui-ci et à la condition que l’actionnaire possède au moins 10% du capital-actions de ladite société.
  • Les biens et droits immobiliers transférés en fiducie ou placés dans un trust.

A noter que c’est la valeur vénale de l’immeuble au 1er janvier qui est déterminante. En d’autres termes, il s’agit du prix auquel l’immeuble aurait pu être normalement négocié s’il avait été vendu au 1er janvier de l’année d’imposition.

Les résidences principales et les propriétés louées bénéficient respectivement d’un abattement de 30% sur la valeur de marché du bien et de 20% en considérant un taux de capitalisation du loyer de 5%. Les bois et forêts et les parts de groupements forestiers sont exonérés pour les 3/4 de leur valeur.

Concernant les propriétés en usufruit, la valeur déterminante est calculée sur la pleine propriété (et payée par l’usufruitier) sauf si l’un des époux a hérité de l’immeuble sur cette base (il se produit alors une séparation entre la valeur de l’usufruit calculée en fonction de l’espérance de vie de l’usufruitier et la valeur de la nue-propriété).

Les dettes (résultant de l’achat, de l’amélioration, de l’agrandissement du bien, etc.) existantes au 1er janvier sont en principes déductibles, sous réserves d’abus (par exemple s’agissant des dettes contractées à un taux préférentiel entre les membres d’une même famille), de dépassement de valeurs seuils (dans l’hypothèse où la propriété du bien est supérieure à 5m €, seulement 60% de la valeur du bien est déductible, le montant restant de la dette n’étant déductible qu’à hauteur de moitié) ou de traitement fiscal avantageux (par exemple en cas de paiement de la totalité du capital à la fin du prêt, soit les prêts dits « in fine », ou les prêts ne prévoyant pas de terme pour le remboursement du capital).

Le seuil de déclenchement de l'IFI demeure inchangé à 1.3m d'euros.

Taux

Comme pour l’ISF, l’ IFI n’est redevable que si le patrimoine immobilier a une valeur nette imposable supérieure au seuil de 1’300’000 €.

Les taux pour 2018 sont les suivants :

Valeur de l’immeuble

  • entre 0 € et 800’000 €, pas d’imposition ;
  • entre 800’001 € et EUR 1’300’000 €, taux de 0.5% ;
  • entre 1’300’001 € et EUR 2’570’000 €, taux de 0.7% ;
  • entre 2’570’001 € et 5’000’000 €, taux de 1% ;
  • entre 5’000’001 € et 10’000’000 €, taux de 1.25% ;
  • Au-delà de 10’000’000 €, taux de 1.5 %.

Un bouclier fiscal s’applique aux résidents français dans la mesure où l’impôt ne doit pas dépasser 75% du revenu (prélèvements sociaux et contribution exceptionnelle sur les hauts revenus inclus).

Enfin, un système de décote permet d’atténuer l’impôt, mais uniquement pour les patrimoines nets taxables compris entre 1’300’000 € et 1’400’000 €.

Le montant de la décote est égal à 17’500 – (1,25 x montant du patrimoine net taxable ).

Déclaration

L’IFI est un impôt déclaratif : il appartient à tout propriétaire foncier d’estimer chaque année si son immeuble est soumis à taxation. Les autorités ne demandent pas de justificatif mais il existe un service en ligne “rechercher des transactions immobilières”, accessible aux particuliers. En revanche, si les autorités estiment que l’immeuble aurait dû être soumis à l’impôt, elles peuvent reprendre le contribuable rétroactivement sur une période de 10 ans.

L’impôt (formulaire 2042-IFI pour les résidents français ou non-résidents mais avec une obligation fiscale en France et 2042-IFI-COV pour les non-résidents sans revenus de source française ; A NOTER QUE CES FORMULAIRES NE SONT PAS ENCORE DISPONIBLES) doit être déclaré en même temps que celui sur le revenu, soit à la fin du mois de mai de chaque année (les dates exactes pour 2018 ne sont pas encore connues). La déclaration peut être faite en ligne (parfois cela est même obligatoire). Le paiement devra être effectué après réception de l’avis avec un règlement au 15 septembre en général (17 septembre pour 2018).

Pour les non-résidents, il convient de s’adresser à :

Service des Impôts des Particuliers Non-Résidents,

TSA 10010, 10 rue du Centre,

93465 Noisy-le-Grand

Vers une suppression des actions au porteur en Suisse

Le Conseil fédéral vient d’ouvrir ce mercredi et jusqu’au 24 avril 2018 une consultation visant à supprimer les actions au porteur des sociétés anonymes suisses non cotées en bourse. Si un tel projet devait entrer en vigueur (il sera discuté à l’automne 2018 au Parlement), les actions au porteur existantes seraient de par la loi converties en actions nominatives. Les sociétés seraient tenues d’adapter leurs statuts au plus tard deux ans après l’entrée en vigueur du nouveau droit.

Les sociétés tiendront également une liste des ayants droit économiques des actions des sociétés (nom, prénom et adresse). Toute violation d’annonce de la part de l’actionnaire ou de la tenue du registre par la société fera l’objet de sanctions pénales (nouveau). Un actionnaire, un créancier ou le préposé au registre du commerce pourra également saisir le juge afin de faire réparer cette carence dans l’organisation de la société.

La suppression des actions au porteur, si elle est acceptée, serait une petite révolution en Suisse. Notre pays rejoindrait ainsi d’autres places financières comme le Royaume-Uni, Singapour, Hong Kong ou encore les États-Unis. Mais il ne faut pas s’y tromper, ce changement n’est pas issu d’une volonté interne de la Suisse mais de la pression internationale exercée par le Forum mondial sur la transparence et l’échange de renseignements à des fins fiscales qui voit manifestement l’être humain comme un criminel avéré. La Suisse veut adapter son droit afin d’obtenir une bonne note (et par là d’éviter des sanctions) lors du prochain examen par les Pairs qui débutera au deuxième semestre 2018.

D’un point de vue juridique, il est vrai que les nouvelles dispositions introduites le 1er juillet 2015 par la loi GAFI ont conduit à un fort rapprochement des actions au porteur et des actions nominatives, si bien que les caractéristiques essentielles de ces deux types de papier-valeurs sont, du point de vue de l’anonymat et du transfert quasi identiques. L’abolition formelle des actions au porteur prévue dans le projet ne changera donc pas fondamentalement les droits et les obligations des actionnaires.

En effet, d’après le droit en vigueur toute personne qui acquiert des actions au porteur à l’obligation d’annoncer cette acquisition à la société concernée dans un délai d’un mois. Elle doit lui communiquer son nom et prénom (en cas de personne physique), ou sa raison sociale (en cas de personne morale), ainsi que son adresse.

L’identité de l’ayant droit économique des actions doit également être annoncée si la participation atteint le seuil de 25 % du capital-actions ou des droits de vote à la suite de l’acquisition.

L’acquéreur doit s’identifier au moyen d’une pièce de légitimation officielle comportant une photographie (passeport, carte d’identité ou permis de conduire) ou d’un extrait du registre du commerce. Une pièce établissant l’acquisition du titre est également demandée.

En cas d’omission et tant que ces obligations ne sont pas remplies, l’actionnaire ne peut exercer ni les droits sociaux (par exemple le droit de vote) ni ceux patrimoniaux (versement des dividendes) liés à ces actions.

Selon le nouveau projet, les détenteurs d’actions au porteur qui ne se seraient pas identifiés auprès de la société conformément à ce qui a été mentionné ci-dessus devront réparer cette omission dans un délai de 18 mois à compter de l’entrée en vigueur de la loi afin que la conversion des actions soit effectuée. Faute d’annonce à l’expiration de ce délai, ils perdront définitivement leurs droits sur les actions au porteur et celles-ci seront annulées. Le conseil d’administration émettra alors des actions propres de la société pour les remplacer. Elles seront libérées au moyen des apports acquis à la société à la suite de l’annulation. La société pourra ensuite librement disposer des actions de remplacement (vente, distribution aux actionnaires, annulation et réduction du capital-actions, conservation, etc.).

Le projet prévoit en outre que les sociétés anonymes (mais également les entreprises individuelles, les sociétés de personnes, les autres personnes morales et les succursales) auront l’obligation de disposer d’un compte bancaire en Suisse si elles atteignent un chiffre d’affaires d’au moins 100’000 francs au cours du dernier exercice. L’idée est ici de contraindre les sociétés à tomber sous le coup de la législation suisse contre le blanchiment d’argent, les banquiers ayant des obligations de vérification de l’identité du cocontractant et de l’ayant droit économique.

En outre, en sus des autorités, les intermédiaires financiers pourront consulter les registres des sociétés (registre des actionnaires et des ayants droit économiques) afin de remplir leurs obligations légales. L’idée de créer un registre central électronique des propriétaires d’actions nominatives est en l’état rejetée.

Enfin, les fondés de procuration chargés de représenter les succursales suisses de sociétés ayant leur siège principal à l’étranger devront avoir accès aux renseignements relatifs aux actionnaires du siège principal à l’étranger ainsi que des ayants droit économiques, et devront pouvoir transmettre ces renseignements aux autorités et intermédiaires financiers. Cette obligation n’est toutefois qu’une simple prescription d’ordre et aucune sanction n’est prévue, mais l’impossibilité de fournir de telles informations devrait sans doute conduire les intermédiaires financiers à refuser la relation d’affaires.

Comme relevé ci-dessus, cette modification législative ne devrait donc pas apporter de grands changements en Suisse sur le plan du droit des sociétés. L’impact est plus psychologique, le droit de la société anonyme datant de 1936 ! Aussi, on peut regretter ce diktat continuel imposé par des organismes supranationaux. D’ailleurs, on se demande si toutes ces mesures sont vraiment efficaces. Le véritable criminel n’aura aucun scrupule à fabriquer un faux document et donner un prête-nom pour la propriété de ses actions. Ce n’est certainement pas la menace d’une amende qui va l’en dissuader.

En tous les cas la société « anonyme » n’a jamais aussi mal porté son nom !

Nouvelles mesures pour lutter contre l’immigration de masse et le chômage en Suisse

Introduction

Afin de mettre en œuvre l’initiative contre l’immigration de masse acceptée par le peuple et les cantons le 9 février 2014 (article 121a de la Constitution (Cst.)) et de lutter contre le chômage, le Parlement suisse a adopté fin 2016 la révision de la Loi fédérale sur les étrangers (LEtr).

L’un des éléments centraux de la modification législative est l’obligation pour les employeurs d’annoncer les postes vacants lorsque le taux de chômage dépasse une valeur seuil dans les professions concernées (selon le code à 5 chiffres de la nomenclature suisse des professions 2000).

Cette mesure est destinée à épuiser le potentiel qu’offre la main d’œuvre en Suisse et de lutter contre l’immigration de masse en provenance de l’Union européenne notamment.

Concrètement, les postes vacants devront être annoncés par les employeurs au service public de l’emploi compétent de leur région s’agissant des catégories professionnelles affichant un taux de chômage au niveau suisse d’au moins 5%. A noter qu’un seuil transitoire de 8% sera appliqué jusqu’au 31 décembre 2019. Il s’agit ici de permettre aux employeurs et aux organes d’exécution d’adapter leurs processus et leurs ressources aux nouvelles règles.

Le Conseil fédéral a adopté les modifications des ordonnances d’application lors de sa séance du 8 décembre 2017. Les nouvelles dispositions entreront en vigueur le 1er juillet 2018.

Lutte contre le chômage en Suisse

Les chiffres du chômage

Le calcul des taux de chômage s’effectuera sur la base des statistiques du SECO et correspondra au nombre de chômeurs inscrits auprès des offices régionaux de placement.

Le chômage moyen en 2016, toutes professions et tous cantons confondus, s’élevait à 3,6% selon la statistique du marché du travail.

En tenant compte d’un taux de chômage de 8% et sur la base des chiffres de 2016, l’obligation de communiquer les postes vacants concernera surtout le secteur de la construction et de l’hôtellerie. Avec un seuil de 5% en revanche, un total de 88 genres de professions sur les 383 répertoriés sera concerné et comprendra en plus notamment les employés du commerce de détail, les chauffeurs, le personnel de maison, le secteur de la restauration et du nettoyage.

Selon le Conseil fédéral, environ 218’000 postes vacants sur les quelque 700’000 pourvus chaque année seront soumis à l’obligation d’annonce pour un seuil de chômage de 5%. Le nombre tombera à 75’000 pour une barre de 8%.

Obligations des employeurs et procédure

Les employeurs seront tenus de communiquer notamment :

–        la profession recherchée ;

–        l’activité et les exigences spéciales requises ;

–        le lieu de l’exercice de la profession ;

–        le taux d’occupation ;

–        la date d’entrée en fonction ;

–        le type de rapport de travail : à durée déterminée ou indéterminée.

La communication de l’emploi vacant se fera via la plateforme Internet du service public de l’emploi, par téléphone ou en personne.

Les informations relatives aux postes vacants annoncés seront accessibles de manière exclusive pendant cinq jours ouvrés aux demandeurs d’emploi inscrits auprès du service public de l’emploi. L’employeur ne pourra pas publier d’autres annonces (par exemple dans les journaux) avant l’échéance de ce délai.

Le délai commencera à courir à partir du jour ouvrable suivant la réception de la confirmation du service public de l’emploi. Ne sont pas considérés comme jours ouvrables les samedis et dimanches ainsi que les jours fériés nationaux, cantonaux et régionaux.

Dans les trois jours ouvrables à compter de la réception de l’annonce complète d’un emploi vacant, le service public de l’emploi transmettra à l’employeur concerné les dossiers pertinents ou l’informera qu’une telle personne n’est pas disponible.

Les employeurs définiront eux-mêmes, sans directive ni devoir de justification, quels sont les candidats qu’ils considèrent appropriés. De même, ils seront libres d’organiser leur recrutement comme ils l’entendent.

Toutefois, les employeurs devront inviter les candidats appropriés à un entretien d’embauche ou à un examen d’aptitude. S’ils ne le font pas, ils seront tenus d’en motiver la raison auprès du service public de l’emploi.

Le législateur a refusé tout devoir de justification des employeurs en cas de non prise en compte de candidats appropriés, proposés par les autorités. De même, ils n’auront pas à justifier pourquoi tel ou tel candidat n’est pas engagé.

En revanche, une obligation d’annonce leur incombe : ils devront communiquer 1) la liste des personnes qu’ils considèrent comme étant appropriées, 2) qui ils ont invité à passer un entretien d’embauche ou un test d’aptitude professionnelle, 3) s’ils ont embauché un candidat ayant été proposé ou 4) si le poste reste vacant.

Aucune procédure d’annonce ne sera nécessaire si la durée des rapports de travail ne dépasse pas 14 jours civils. Il en ira de même s’agissant de l’engagement d’anciens apprentis, de membres d’une même famille ou encore les postes pourvus par des personnes (y compris les stagiaires) déjà employées par le même employeur au sein d’un groupe.

A noter encore que les cantons pourront eux-mêmes demander au Conseil fédéral, d’introduire une obligation d’annonce pendant une durée maximum d’un an, des emplois vacants pour une profession donnée si le taux de chômage dans le territoire cantonal concerné atteint ou dépasse les 8% (respectivement 5% dès le 1er janvier 2020). Cette requête pourra également être déposée conjointement par plusieurs cantons, lorsque les conditions requises pour ce faire sont remplies dans leurs territoires respectifs.

Sanctions

Les employeurs qui intentionnellement violeront l’obligation de communiquer les postes vacants ou l’obligation de mener un entretien ou un test d’aptitude professionnelle seront punis d’une amende de 40’000 francs au plus. En cas de négligence, l’amende sera de 20’000 francs au plus.

Conclusion

Tenant compte de la volonté populaire et des intérêts économiques de la Suisse, le Parlement et le Conseil fédéral ont pris les mesures nécessaires en vue d’encourager le potentiel des travailleurs en Suisse et de renforcer l’exécution de la législation sur les étrangers. L’idée de contraindre les employeurs à une obligation d’annonce des postes vacants afin de diminuer l’afflux de main-d’œuvre étrangère supplémentaire est à saluer dans la mesure où les accords internationaux, notamment l’ALCP, sont respectés. Il est toutefois impossible de prédire à ce stade si les effets seront à la hauteur des attentes puisqu’une telle mesure est inédite en Suisse.

Aussi, l’introduction d’un délai transitoire est bienvenue. En effet, cette nouvelle obligation d’annonce contraint les entreprises, surtout les PME, à s’organiser et à former du personnel spécialisé, voire de mettre en place une unité juridique. Indubitablement, les coûts administratifs des entreprises vont augmenter.

Enfin, on relèvera que le Conseil fédéral pourra fixer une nouvelle valeur seuil à tout moment si la situation sur le marché du travail l’exige.

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